19 août 1953 : opération Ajax , les Iraniens s'en souviennent !

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19 août 1953 : opération Ajax , les Iraniens s'en souviennent !

Le coup d’État de 1953 orchestré par le Royaume-Uni et les États-Unis permet au Shah d’Iran, Mohammad-Reza Pahlavi, de remonter sur le trône, consacrant l’échec de la première tentative d’un pays du tiers-monde d’acquérir la maîtrise de ses richesses naturelles.

Le pétrole, dont l’Iran était le plus ancien et principal producteur au Moyen-Orient, échappe à l’emprise du gouvernement qui ne perçoit que des redevances octroyées par la toute-puissante Anglo-Iranian Oil Company (AIOC). Devenu Premier ministre, le 29 avril 1951, Mossadeq nationalise l’Anglo-Iranian Oil Company. S’étant emparé des puits iraniens, il expulse les techniciens britanniques. En représailles, le Royaume-Uni menace de saisir les « bateaux pirates transportant du pétrole rouge ». Des experts français révèlent, alors, les malversations de l’AIOC : corruption massive, dissimulation de recettes... Mossadeq rompt les relations diplomatiques avec Londres. Les marchés se ferment au pétrole iranien. À l’intérieur du pays, un bras de fer s’engage entre le docteur Mohammed Mossadeq, et le souverain d’Iran, le Shah Mohammad-Reza Pahlavi, qui règne depuis 1941. En juillet 1952, ce conflit avec le Shah provoque la démission de Mossadeq. Cependant, quelques jours seulement après sa démission, il revient au pouvoir, grâce au soutien populaire et prépare un référendum, en vue de la réforme électorale.

En août 1953, suite à un référendum, Mossadegh dissout le Majlis (le Parlement iranien) et annonce de nouvelles élections. Une première tentative de coup d’État orchestré par des officiers favorables au Shah et par la CIA, pour porter Zahedi au poste de Premier ministre et destituer Mossadeq, est montée. Mais Mossadeq est mis au courant, et, dans la nuit du 15 au 16 août, les conjurés sont interpellés. Prête à cette éventualité, la CIA avait préparé des unités militaires pro-Zahedi à s’emparer des points névralgiques de Téhéran. Mais les officiers disparaissent, lorsque les meneurs sont arrêtés, faisant échouer cette première tentative. Le Shah fuit en exil, d’abord, à Bagdad, puis, à Rome, et Kermit Roosevelt, directeur de la section locale de la CIA, annonce, à Washington, que le coup d’État a échoué. 

Kermit Roosevelt et son équipe décident d’improviser une autre tentative. Afin de mobiliser l’opinion publique contre Mossadeq, leurs deux principaux agents iraniens mènent une série d’opérations « noires » proférant des menaces téléphoniques contre des chefs religieux et « simule un attentat » contre la maison d’un ecclésiastique, en se faisant passer pour des membres du parti communiste Tudeh. Le 18, ils organisent, également, des manifestations, dont les participants prétendent appartenir au Tudeh, les manifestants saccagent les bureaux d’un parti politique, renversent des statues du Shah et de son père, et sèment le chaos dans Téhéran. Réalisant ce qui est en train de se passer, le Tudeh recommande à ses membres de rester chez eux, ce qui l’empêche de s’opposer aux manifestants anti-Mossadeq, qui envahissent les rues, le lendemain.

Le matin du 19 août, ces derniers commencent à se rassembler, à proximité du bazar de Téhéran. Les « fausses » manifestations du Tudeh et les autres opérations « noires » menées, au cours des jours précédents, poussèrent de nombreux Iraniens à rejoindre ces manifestations. Des membres iraniens de l’équipe de la CIA mènent alors les manifestants dans le centre de Téhéran et persuadent des unités de l’armée de les épauler, incitant, au passage, la foule à attaquer le quartier général du parti iranien favorable à Mossadeq et à incendier une salle de cinéma et plusieurs rédactions de presse. Des unités militaires anti-Mossadeq commencent, dès lors, à prendre possession de Téhéran, s’emparant de stations radio et d’autres points sensibles. De vifs combats se déroulent, mais les forces favorables au Premier ministre sont finalement vaincues. Mossadeq, lui-même, se cache, mais se rend finalement le lendemain. Le 22 août, le Shah revenait à Téhéran. Le général Zahedi devint Premier ministre. Le pouvoir économique restait aux mains des grandes compagnies pétrolières étrangères.

 La destitution de Mossadeq permet l’arrivée des Américains dans le grand jeu pétrolier du pays. Un consortium international composé de compagnies françaises, hollandaises, britanniques et américaines est créé, pour gérer la production pétrolière de l’Iran. Les compagnies britanniques ne possédaient plus que 40 % des parts. Les Américains en récupèrent ainsi 40 %, et les derniers 20 % se partageaient entre Français et Hollandais. Mossadeq est condamné à mort, en décembre 1953, par un tribunal militaire, mais, sur l’intervention du Shah, la peine est réduite à trois années de prison. Il sera, ensuite, libéré, et meurt, sous surveillance de la SAVAK (police secrète du Shah), en mars 1967.

 

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