Circonstance de la révélation du verset 23 du Sourate Ash-Shura(Délibération).
La sourate ash-Shûrâ est considérée comme une sourate mecquoise. Les versets 23 à 26 et 38 à 40 sont révélés à Médine.[1]
ذَٰلِكَ الَّذِي يُبَشِّرُ اللَّـهُ عِبَادَهُ الَّذِينَ آمَنُوا وَعَمِلُوا الصَّالِحَاتِ ۗ قُل لَّا أَسْأَلُكُمْ عَلَيْهِ أَجْرًا إِلَّا الْمَوَدَّةَ فِي الْقُرْبَىٰ ۗ وَمَن يَقْتَرِفْ حَسَنَةً نَّزِدْ لَهُ فِيهَا حُسْنًا ۚ إِنَّ اللَّـهَ غَفُورٌ شَكُورٌ ﴿٢٣﴾
C'est la gracieuse annonce faite par Allah à Ses serviteurs qui croient et accomplissent les œuvres pies. Dis : « Pour cela, je ne vous réclame nul salaire [autre] que l'affection à l'égard' des Proches ». A quiconque réalise une belle action, Nous répondons par récompense plus belle encore. Allah est absoluteur et appréciateur de la reconnaissance (shakûr).
Ccoran, Sourate XLII, verset 23, traduction de Régis Blachère
Verset de Mavaddat » (en arabe : آية المودة) est une partie du verset 23 de la sourate «Ash-Shoûrâ»(consultation) sur les particularités des Ahl-ul-Bayt et l’amour envers les Membres de la famille prophétique présenté comme salaire du Prophète.
Il est cité des circonstances de la révélation pour certains versets y compris les versets 23 et 27 de la sourate ash-Shûrâ, Verset de al-Mawaddat.
Contexte de la Révélation
Tous les commentateurs chiites et de nombreux commentateurs sunnites ont rapporté d’Ibn Abbâs qu’après l’émigration du Prophète (s) à Médine, les habitants de Médine qui avaient accueilli le Prophète (s), se mirent à discuter sur le projet de gouvernement islamique. Ils décidèrent de proposer au Prophète Muhammad (s) de mettre tout ce qu’ils avaient à sa disposition pour le développement de l’islam et la gestion de la nouvelle société musulmane et de ses besoins financiers, ajoutant que toute décision et action de sa part, seraient les bienvenues.
C’est alors que ce verset fut révélé au Prophète Muhammad (s)[4] présentant l’amour de ses proches et non un quelconque bien matériel, comme salaire de la prophétie.
Sens du terme al-qurba (الْقُرْبَىٰ)
Les commentateurs du Coran ont donné des avis différents sur ce terme:
1.La plupart des commentateurs ont expliqué que ce verset s’adressait à la tribu de Quraysh et que Dieu avait ordonné au Prophète Muhammad (s) qui s’opposait à leurs dieux, de leur dire que s’ils ne croyaient pas en lui, qu’ils le laissent au moins tranquille à cause des liens de parenté qui les unissaient.
Le terme al-qurba (الْقُرْبَىٰ) a été pris dans le sens de « gens reliés par des liens familiaux » et non dans le sens d’une filialité sanguine.
2.Certains ont dit que « l’amour envers les proches » n’était pas une recommandation faite aux Qurayshites mais une recommandation aux «Ansârs» (habitants de Médine) qui avaient apporté une somme d’argent au Prophète (s) pour ses dépenses personnelles. Le Prophète (s) avait refusé et leur avait recommandé, au lieu de ce salaire, l’amour de ses proches, c'est-à-dire les gens de la lignée de sa mère Âmina, présents à Médine.
3.Certains ont dit que «الْمَوَدَّةَ فِي الْقُرْبَىٰ» était l’amour des proches, et que ce verset s’adressait à la tribu des Qurayshites ou aux musulmans en général, dans le sens où le [[Prophète Muhammad (s)] demandait aux gens d’aimer leurs proches et de respecter les liens familiaux.
4.Certains ont déclaré que le sens de الْمَوَدَّةَ فِي الْقُرْبَىٰ»« était l’amour de Dieu et l’effort pour se rapprocher de Lui par l’obéissance. Le sens de ce verset serait alors : « Je ne vous demande aucun salaire en dehors de vos efforts pour vous rapprocher de Dieu et L’aimer. »[5]
Les savants chiites ont répondu à ces quatre interprétations qu’ils ont toutes réfutées. Pour plus de renseignements, se référer aux articles cités à la fin de texte.
5.Ces commentateurs ont expliqué l'expression الْمَوَدَّةَ فِي الْقُرْبَىٰ»« par l’amour des membres de la famille du Prophète Muhammad (s), et de nombreux hadiths sunnites et surtout chiites l’ont confirmé. Des hadiths considérés comme authentiques ont été rapportés par les deux écoles sur la nécessité d’aimer les Ahl al-Bayt (a), ce qui confirme cette interprétation[6].
Les religieux chiites ont prouvé d’après leurs sources, que le mot al-qurba (الْقُرْبَىٰ) fait allusion à Imam Ali (a), Fatima Zahra (a), Hasan, Husayn et les neuf Imams de la descendance de l’Imam al-Husayn (a)[7].
Allâmat al-Hillî considérait ce verset comme le quatrième verset prouvant la légitimité de l’Imâmat de l’Imam Ali (a), et Ibn Abbâs a rapporté que lors de la révélation de ce verset, les gens ont demandé au Prophète Muhammad (s) qui ils étaient appelés à aimer. Le Prophète Muhammad (s) avait répondu : «Ali, Fatima, al-Hasan et al-Husayn»[8].
Ibn Hanbal, chef de l’école hanbalite, a rapporté ce hadith d’Ibn Abbâs[9].
L’Imam Zeinulabidine, as-Sajjâd (a) interrogé au sujet de ce verset, a dit :
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- « Ce verset signifie que c’est nous qu’il faut aimer car nous sommes la famille de Prophète Muhammad (s)»[10]. Imam Muhammad al-Bâqir (a) a dit que les Saints Imams sont ceux à qui fait allusion ce verset[11].
L'Imam Ja'far as-Sâdiq (a) a déclaré que ce verset concernait les Ahl al-Bayt (a) et ceux qui étaient présents sous « le manteau » du Prophète Muhammad (s) lors de la révélation du verset de la purification (voir : Les cinq du manteau)[12].
Hâkim al-Haskâni, religieux sunnite, a rapporté sept riwaya (récits) qui montrent que les proches «الْقُرْبَىٰ» sont « Imam Ali (a), Fatima (a), al-Hasan et al-Husayn »[13].
Ahmad b. Hanbal a rapporté :
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- « Quand le verset a été révélé, les compagnons ont demandé au Prophète Muhammad (s) de qui s’agissait-il ; et le Prophète Muhammad (s) a répondu trois fois : « Ali, Fatima, et leurs deux fils»[14].
Sayyid Shahâb ad-din Mar’ashî Najafî, dans le commentaire Ihqâq al-Haq, a cité le nom d’une cinquantaine de grands religieux sunnites qui ont rapporté dans leurs livres, les preuves de l’authenticité des riwaya (récits) concernant ce verset[15].
Sayyid Hâshim Bahrânî, dans le livre Ghâyat al-Marâm, a rapporté 17 riwaya (récits) sunnites et 22 riwaya chiites à ce sujet[16].
Raisons de la nécessité du respect des Ahl ul-Bayt (s)
Si nous considérons les hadiths rapportés du Prophète Muhammad (s) dans les deux écoles qui renvoient les musulmans aux Ahl al-Bayt (a) pour la compréhension du Livre et des principes élémentaires et secondaires de la religion, comme le hadith al-Thaqalayn et hadith al-Safina ou autres, nous ne pourrons plus douter du fait que l’appel à l’amour des Ahl al-Bayt (a) présenté comme récompence de la prophétie du Prophète (s), et il n’avait comme but que de renvoyer les gens aux Ahl al-Bayt (a) qui sont les références et la garantie du message prophétique. Ce verset n’est pas en contradiction avec le refus d’un récompense (salaire) de la part du Prophète Muhammad (s).
Selon ce commentaire, l’amour envers les Ahl al-Bayt (a) est présenté symboliquement comme un salaire et ne contrarie pas les autres versets sur le refus du Prophète de tout salaire, car la récompense dont il est question dans ce verset, concerne les musulmans et non les membres de la famille prophétique[17]
Affection envers les Ahl al-Bayt (a), Selon le verset 23, l’affection des Ahl al-Bayt (a) est comme le salaire du Prophète (s). Dans l'interprétation de ce verset, ‘Allâma Tabâtabâ’î mentionne bien qu'il est souligné à plusieurs reprises dans le Coran que le Prophète (s) ne demandait aucune récompense pour sa prophétie et considérait l'acceptation de son appel par les gens comme sa récompense,[11] dans ce verset, Dieu attribue un salaire à la mission du Prophète (s). D’après d’autres versets, on peut en déduire que demander le salaire dans ce verset, comme d'autres versets, est l'acceptation de l’invitation du Prophète (s) par le peuple.[12] Autrement dit, le Prophète (s) invite les gens à l’affection de ses Ahl al-Bayt (a) et le verset 23 présente cette affection comme accepter l’invitation du Prophète (s).
Dans un hadith, après l’événement d’Achoura quand les captifs de Karbala ont été à Cham, l’Imam as-Sajjâd en réponse à l’insulte d’un homme, récita le verset 23 de la sourate ash-Shûrâ et dit que c’est nous, les Ahl al-Bayt du Prophète (s).[13]
6- Tabarsi, 1425, 9/48
7-Tûsi, vol. 9, p. 158 ; Tabarsi, vol. 9, p. 48
9-Ibn Hanbal, Les qualités de le Prince des croyants, ‘Ali b. Abi Tâlib, p. 295
10- Kûfi, p. 392
11- Kuleiny, vol. 1, p. 413
12- Hâkim Haskâni, vol. 2, p. 213
13- Hâkim Haskâni, vol. 2, p. 189-196
14-Muhammad b. Ahmad b. Abî Bakr Al-Ansârî Al-Qurtubî, vol. 3, p. 2
15- Husayni Mar’ashi Tastari, vol. 3, p. 2-18
16- Bahrâni, vol. 3, p. 23-244