Des millions de musulmans de différents pays arrivent chaque année à l'irakienne ville sainte de Karbala pour commémorer le jour de Arbain, cérémonie religieuse qui marque l'aboutissement d'une période de 40 jours de deuil après l'anniversaire du martyre de l'Imam Hussein (que la paix soit sur lui), petit-fils du prophète Mohamad (PSLF) et le troisième Imam chiite.
Le pèlerinage d’Arbaeen est l'une des plus importantes réunions annuelles du monde en un seul endroit.
Le jour de l'Achoura, le 10 du mois de Muharram en l'an 680 A.c., sur le sable chaud du désert de Karbala, en Irak, de l'Imam Hussein (P) et de 72 membres de sa famille, les amis et les partisans, dont un fils de 6 mois, ont été martyrisés dans les circonstances plus horribles de l'armée de Yazid, le deuxième calife omeyyade.
Sayyed Ibn Tawous(théologien et historien) dit : « Du retour de la Syrie, lorsque, les femmes et les enfants de l’Imam al-Hussein (que la paix de Dieu soit sur lui), arrivèrent en Irak, ils demandèrent au guide de la caravane de les amener à Karbala. Lorsqu’ils arrivèrent à l’endroit du martyre de l’Imam al-Hussein et de ses compagnons, ils y virent Jabir Ibn Abdullah Al-Ansari et un groupe des Bani Hashim ainsi qu’un membre de la famille du messager de Dieu, qui étaient venu rendre visite à la tombe du vénéré Imam al-Hussein (béni soit-il).
Ils y arrièrent, tous, dans un même temps. Des yeux remplis de larmes, très affligés et attristés, ils organisèrent la cérémonie de deuil pour l’Imam Hussein. Les femmes de cette région aussi les rejoignirent. Donc, ils organisèrent quelques jours de deuil dans une ambiance, pleine d’affliction et d’émotion.
Les événements du mois de Muharram sont un moment fort dans l'histoire de l’Islam. Bien que 14 siècles de la tragédie du martyre de l'Imam Hussein (P) se est écoulé, les musulmans chiites dans le monde chaque année rappellent l'épopée entourant ce crime injuste et le message véhiculé Imam Husayn (P) pour donner sa vie dans la lutte contre la tyrannie et le despotisme, et de défendre les valeurs humaines de la vérité, la justice et la liberté. En d'autres termes, les cérémonies de l'Achoura symbolisent la position éternelle et inébranlable de la vérité contre le mensonge et la lutte de l'humanité contre l’oppression.
Chaque année, pendant Muharram et 40 jours, les réunions de deuil en Iran et en Irak sont faites, ainsi que dans divers pays d'Asie, d'Europe et des Amériques. Dans ces réunions, les fidèles musulmans commémorent l'épopée de Karbala et bien que les rites diffèrent selon le pays et la région, ils pleurent tous pour la même raison, à savoir, la cruauté et de crimes contre un être humain qui se est efforcé d’établir le promouvoir la justice et la liberté. Dans ces cérémonies, les souffrances des martyrs de Karbala sont racontées, et se lamenteront déploré tout en expliquant les valeurs et les enseignements défendues par l'Imam Hussein (P) et ses disciples.
Alors que Arbaeen est une cérémonie spéciale et typique chiites, sunnites, izadies, les zoroastriens, les chrétiens et même participer à cet événement, considéré comme l'un des plus grands rassemblements religieux du monde du point de vue de la quantité des personnes fréquentant la même, soit trois fois la population à partir de laquelle à la Mecque, ce qui donne un sens totalement différent, car les gens de différentes confessions et races lui commémorent et donc reconnaissent l'Imam Hussein (P) comme un symbole de la liberté et de sacrifice.
Pourquoi s’intéresser au chiffre 40 ?
40 est la traduction du mot arabe « arbaeen ». C’est un événement important de l’Islam qui correspond au 20 Safar qui est le quarantième jour après la tragédie d’Achoura. Ce jour est particulier car après Achoura, c’est l’autre date où à travers le monde, les shiites vont à nouveau se réunir pour se rappeler Achoura et commémorer le souvenir de la souffrance des captifs de Sham.
C’est une date unique car on y commémore la force et le sacrifice considérable consentie par une femme : Janabe Zaynab (ahs), qui va porter à bout de bras avec son neveu, le 4ème Imam (as), la postérité des événements de Achoura
Le nombre 40 dans le Saint Coran
L’un des tous premiers versets qui évoque le chiffre 40 se rapporte à l’histoire du Prophète Moussa (as). Le verset 51 de la sourate 2 al-Baqarah nous raconte :
وَإِذْ وَاعَدْنَا مُوسَى أَرْبَعِینَ لَیْلَةً ثُمَّ اتَّخَذْتُمْ الْعِجْلَ مِنْ بَعْدِهِ وَأَنْتُمْ ظَالِمُونَ
« Et [rappelez-vous] lorsque Nous donnâmes rendez-vous à Moïse pendant quarante nuits!... Puis en son absence vous avez pris le Veau pour idole alors que vous étiez injustes (à l’égard de vous-mêmes en adorant autre qu’Allah). »
Cet extrait du Saint Coran rappelle le moment où Nabi Moussa (as) fut appelé au mont Sinaï par Dieu afin de lui confier la Thora. Nabi Moussa (as) est véritablement une figure prééminente de toutes les religions monothéistes avec une position centrale dans la religion juive. Nabi Moussa (as), après sa naissance, a été recueilli par la famille du Pharaon d’Egypte, au sein même de son palais. Après avoir accidentellement tué un soldat égyptien pour protéger un esclave juif, il est contraint de quitter l’Egypte vers les terres de Madayn. Là il fait la rencontre de Nabi Shoeb (as) dont il va épouser une des filles.
Dieu lui demande, quelques années après, de retourner vers Pharaon pour l’inviter au monothéisme et pour prêcher l’unicité de Dieu.
Ce chiffre est souligné dans le verset suivant du Coran
وَ واعَدْنا مُوسي ثَلاثينَ لَيْلَةً وَ أَتْمَمْناها بِعَشْرٍ فَتَمَّ ميقاتُ رَبِّهِ أَرْبَعينَ لَيْلَةً وَ قالَ مُوسي لِأَخيهِ هارُونَ اخْلُفْني في قَوْمي وَ أَصْلِحْ وَ لا تَتَّبِعْ سَبيلَ الْمُفْسِدينَ
le verset 142 de la sourate 7 al-Araf, on constate que cet autre verset évoque différemment la période de 40 jours d'absence de Moïse : « Et Nous donnâmes à Moïse rendez-vous pendant trente nuits, et Nous les complétâmes par dix, de sorte que le temps fixé par son Seigneur se termina au bout de quarante nuits. Et Moïse dit à Aaron son frère: 'Remplace-moi auprès de mon peuple, et agis en bien, et ne suis pas le sentier des corrupteurs'.»
Le nombre 40 est fortement lié à la vie de tous les Prophètes et pas seulement Nabi Moussa (as). Voici d’autres exemples du lien entre la vie de nos Prophètes et ce fameux chiffre 40 :
- Les règnes de Nabi Dawoud et de Nabi Sulayman (as) ont duré 40 ans,
- Notre Saint Prophète (saww) a fait l’annonce de la prophétie à l’âge de 40 ans,
- L’argile dans laquelle a été façonné Nabi Adam (as) fut modelée pendant 40 jours
- Ou encore le déluge du temps de Nabi Nouh a duré 40 jours.
La dimension spirituelle du chiffre 40
Évoquons la dimension spirituelle du chiffre 40. Ce chiffre a une résonance particulière dans l’Islam et dans le développement spirituel des êtres humains. Pour poser le décor, citons quelques exemples de hadiths ou de pratiques qui sont des invitations à l’élévation spirituelle :
- Ceux qui récitent le dou’a-e-ahad durant 40 jours seront au nombre de ceux qui aideront notre 12ème Imam (as)
- Ceux qui récitent le zyarat Achoura durant 40 jours verront leurs prières exaucées
- Ceux qui font du commérage (ghibat) verront leurs prières ne pas être acceptées durant 40 jours, c.-à-d. qu’ils n’en tireront aucun bénéfice spirituel. Plutôt que de chercher à mesurer la taille de nos péchés, il est parfois bien plus salutaire de se demander contre qui nous avons désobéi en commettant un péché.
Attardons-nous sur la tradition suivante : « celui qui mémorise et préserve 40 hadiths sera ressuscité en compagnie des savants aux jours de la résurrection. » En réfléchissant un peu, on réussira à nous rappeler de 40 hadiths. Mais est-ce pour autant une garantie pour être au nombre des savants au jour de la résurrection? Non! Même un enfant de 3 ans peut apprendre par cœur des hadiths. Il n’y a rien d’exceptionnel à cela. Ce qui mérite cette grande récompense c’est au contraire la capacité à les comprendre, à les appliquer dans nos vies et à les transmettre aux générations futures. Celui qui mémorise et préserve 40 hadiths sera ressuscité en compagnie des savants aux jours de la résurrection.
Un des Imam D`Ahlul-Bayte(as) a dit : « Si vous guidez un aveugle sur quarante pas alors Allah vous promet le Paradis. » Pour couper court à toute spéculation, soyons clair : tenir la main d'une personne aveugle pour l'aider sur 40 pas n'assure en rien le Paradis. Il faut ici considérer la portée spirituelle du chiffre 40. L'aveugle symbolise un être humain qui a un cœur et un esprit aveugles, en raison de l'envie, l'hypocrisie, la médisance ou encore l'attachement aux choses matérielles de ce monde. Alors il n'est pas étonnant qu'une personne qui parvient à conduire une telle personne vers la foi soit bénie par Dieu.
Dans le Saint Coran, Sourate 46 verset 15, il est écrit :
وَوَصَّيْنَا الْإِنسَانَ بِوَالِدَيْهِ إِحْسَانًا حَمَلَتْهُ أُمُّهُ كُرْهًا وَوَضَعَتْهُ كُرْهًا وَحَمْلُهُ وَفِصَالُهُ ثَلَاثُونَ شَهْرًا حَتَّى إِذَا بَلَغَ أَشُدَّهُ وَبَلَغَ أَرْبَعِينَ سَنَةً قَالَ رَبِّ أَوْزِعْنِي أَنْ أَشْكُرَ نِعْمَتَكَ الَّتِي أَنْعَمْتَ عَلَيَّ وَعَلَى وَالِدَيَّ وَأَنْ أَعْمَلَ صَالِحًا تَرْضَاهُ وَأَصْلِحْ لِي فِي ذُرِّيَّتِي إِنِّي تُبْتُ إِلَيْكَ وَإِنِّي مِنَ الْمُسْلِمِينَ
« Et Nous avons enjoint à l’homme de la bonté envers ses père et mère: sa mère l’a péniblement porté et en a péniblement accouché; et sa gestation et sevrage durent trente mois; puis quand il atteint ses pleines forces et atteint quarante ans, il dit : ‘Ô Seigneur! Inspire-moi pour que je rende grâce au bienfait dont Tu m’as comblé ainsi qu’à mes père et mère, et pour que je fasse une bonne œuvre que Tu agrées. Et fais que ma postérité soit de moralité saine. Je me repens à Toi et je suis du nombre des Soumis’.»
Ce verset parle de l’âge de la maturité spirituelle et intellectuelle de l’être humain. Selon certaines traditions de nos Saint Imam, même Shaytan s’étonne de voir une personne de 40 ans n’ayant toujours pas trouvé le chemin vers Dieu.
La commémoration d’un mort 40 jours après son décès
Essayons d’expliquer maintenant pourquoi il est recommandé de commémorer le 40ème d’un proche décédé. Profitons-en pour citer les traditions qui soutiennent cette pratique. Le Saint Prophète (saww) a dit que : « La terre pleure le décès d’un croyant durant une période de 40 matins. »
Ces quarante jours de souvenir sont une manière d’honorer la mémoire de nos proches défunts. De la même manière, lui donner l’ablution funéraire (ghusl-e-mayyat) ou préparer de la nourriture pour les proches des défunts sont d’autres manières de l’honorer. C’est une pratique très recommandée en Islam.
Commémorer le 40ème n’est pas une tradition mais c’est un acte recommandé dans l’Islam.
S’il est recommandé de commémorer le 40ème de nos proches décédés, alors imaginez l’importance de la commémoration du 40ème d’Imam Houssayn (as), l’un des 14 musulmans les plus parfaits de la création et le plus admirable que la terre a eu le privilège de porter. Arbaeen est une commémoration en accord avec la Sunna du Saint Prophète (saww).
Imam Baqir (as) a dit : « Les cieux ont pleuré sur Imam Houssayn (as) durant 40 jours, se levant rouge et se couchant rouge ». Il disait aussi : « le Paradis a pleuré durant 40 matins après la mort de Hussayn. »
Après 40 jours de souvenir de la tragédie de Karbala, le jour d’Arbaeen, nous récitons le zyarat Arbaeen afin de renouveler l’allégeance et l’obéissance que nous avons promises à notre Imam le jour d’Achoura à travers le zyarat Achoura. Imam al-Askari (as) a expliqué qu'il y a cinq signes qui permettent de reconnaître un vrai croyant :
- Effectuer les 51 rakaats de prières journalières (dont 17 sont obligatoires),
- Le port d’une bague sur la main droite,
- Prononcer de manière intelligible et claire « bismilla ar-Rahman ar-Rahim » durant les prières,
- Se prosterner(pour Allah à lui la gloire) sur la terre, de préférence la terre de Karbala
- Et enfin effectuer le Zyarat Arbaeen.
A la fin on attire votre attention sur quelques recommandations de l'imam Hussein à son fils, l’Imam Ali Ibn Al-Hussein (p) :
- mon fils ! Ne traite pas injustement celui qui ne trouve qu’Allah pour l’assister contre toi».
- L’homme ne doit traiter injustement aucun autre homme, car Allah, à Lui la Grandeur et la Gloire, déteste l’injustice et les injustes et aime la justice et les justes… Mais il existe une justice qui est plus grave et plus impitoyable qu’une autre. Nous pouvons traiter injustement un homme en le frustrant de son bien, alors qu’il peut se défendre et faire valoir son droit par la force ; mais il y a celui qui ne peut pas se défendre ou revendiquer son droit parce qu’il est faible. Traité injustement, cet homme se présentera devant Allah et dira : « Seigneur ! Assiste-moi contre untel ». Lorsque celui qui est traité injustement invoque l’assistance d’Allah, Allah l’aidera.
- « Garde-toi de faire ce dont tu aurais à t’excuser. Le croyant ne fait pas le mal et ne s’excuse pas, alors que l’hypocrite fait le mal tous les jours et s’en excuse ». Il ne faut pas faire ou dire ce qui nous porte à chercher des excuses auprès des gens. Le croyant suit toujours la ligne droite. Il ne fait ni dit rien sans savoir que ce qu’il fait ou qu’il dit plaît à Allah, à Lui la Gloire, et sans savoir qu’il peut défendre ce qu’il fait ou dit. De son côté, l’hypocrite fait le mal chaque jour et s’en excuse, car il n’a pas de règle morale qui dirigerait ses actes et ses paroles.
- «Que les autres aient besoin de vous, cela fait partie des bienfaits dont Allah vous comble. Sachez que le bien que vous faites vous attire des louanges et vous procure une rétribution. Si le bien prenait la forme d’un homme, vous le verriez alors beau et gracieux, faisant plaisir à ceux qui le regardent. Si la vilénie prenait la forme d’un homme, vous le verriez alors laid, déformé, dont les regards se détournent et les cœurs ne souffrent point ».
- Si les autres ont besoin de toi, que ce besoin soit dans un domaine scientifique, financier ou autre, et si les autres viennent vers toi à la recherche d’un service que tu peux leur rendre, tu ne dois pas considérer que cela est un lourd fardeau. Tu dois au contraire remercier Allah car cela te rapproche de Lui et des hommes. Tu en as à être rétribué par Allah, à Lui la Grandeur. Si le bien prenait une forme humaine, elle serait belle car la nature du bien, celle des éléments qui le constituent ainsi que ses conséquences reflètent sa beauté du bien et celle de l’obéissance, alors que ceux du mal reflètent sa vilénie et celle de la désobéissance.
- « Celui qui entreprend de faire quelque chose en désobéissant à Allah, ne fait que se frustrer d’avance de ce qu’il espère avoir ; il ne fait qu’accélérer l’arrivée de ce qui le hante».Il y a des gens qui désobéissent à Allah pour régler certaines affaires. Le péché devient ainsi une condition de ce qu’ils espèrent avoir. Ceux-là n’obtiennent pas ce qu’ils recherchent. Lorsque l’homme veut atteindre un but et résoudre ses problèmes, il doit rechercher l’équilibre entre les moyens et les fins. Les moyens doivent satisfaire Allah et non pas causer Sa Colère.
Nous lisons dans l’un des discours de l’Imam Al-Hussein (p) : « O gens ! Celui qui se comporte généreusement aura la suprématie. Celui qui se comporte parcimonieusement sera avili. Le plus généreux parmi les gens est celui qui donne à ceux qui ne s’y attendent pas. Le plus tolérant parmi les gens est celui qui pardonne tout en étant assez puissant. Celui qui, communique le plus avec les gens, est celui qui le fait avec ceux qui rompent avec lui. Les souches poussent là où elles sont plantées et s’élèvent grâce à leurs rameaux. Celui qui se hâte de faire du bien à son frère le retrouvera demain en rejoignant Allah((le bien que vous aurez avancé pour vous-mêmes vous le retrouverez auprès d’Allah)) [2:110].
Celui qui rend un service à son frère sera récompensé par Allah lorsqu’il en aura le plus besoin. En échange de ce bien, Allah, à Lui la Gloire et la Puissance détournera du croyant davantage d’épreuves dans ce monde-ci et le récompensera dans l’Au-delà.Et de celui qui dissipe la détresse d’un croyant, Allah dissipera les détresses de ce monde-ci et celles de l’Au-delà. Allah fait du bien à celui qui fait du bien, Ilaime les bienfaiteurs».