À mesure que le temps passe, Israël commence à s'en apercevoir : le Golan, territoire éternellement syrien qu'il veut faire sien, à l'appui des effets d'annonce, a toutes les chances de lui être fatal.
En effet, l'annonce du 21 mars du président américain Donald Trump en faveur de la reconnaissance de l'occupation israélienne du plateau du Golan a suscité un tollé au Liban. Selon le président libanais Michel Aoun, la décision américaine menace la souveraineté de l’État libanais surtout en ce qui concerne les fermes de Chebaa, les hauteurs de Kfarchouba et le village de Ghajar, tous occupés par Israël. Or, pour de nombreux analystes, c'est dans les fermes de Chebaa qu'Israël risque de subir son premier repli militaire dans l'ensemble des territoires arabes qu'il occupe actuellement.
Il est vrai qu’en 2000 la Résistance libanaise a réussi à imposer à Israël un retrait unilatéral inconditionnel de la plupart des territoires occupés. Ehud Barak, le Premier ministre de l’époque, avait alors décidé de mettre fin à plus de 20 ans d’occupation et d’abandonner ses alliés de « l’Armée du Liban Sud » (ALS), en se retirant du Liban où Israël a perdu plus de 1 000 soldats. Vendredi 5 avril, des manifestants libanais se sont rassemblés non loin des fermes de Chebaa contre l'occupation israélienne, ce qui a déclenché l'alerte du côté des troupes israéliennes.
Les troupes israéliennes ont donc été mises en alertes, hier, vendredi 5 avril après que des habitants se sont rassemblés dans les fermes de Chebaa, au sud au cri « Chebaa est libanaise ».
Brandissant des pancartes, des documents prouvant la « libanité » des fermes de Chebaa, les manifestants scandaient des slogans contre l'occupation israélienne.
Israël ne s’est retiré qu’en 2000 de certaines zones méridionales libanaises. En fait, Israël a occupé plusieurs autres régions, dont les fermes de Chebaa et Tilal Kfar Chouba et le village de Ghajar, soit des régions qui sont potentiellement aptes à devenir un front pour des combats de libération.
« Le Liban n'acceptera jamais la Ligne bleue comme le tracé de ses frontières. Nous poursuivrons nos efforts pour libérer les territoires occupés du Liban. Nous ne renoncerons jamais à une parcelle du territoire libanais », a martelé le député socialiste et sunnite, membre du parti Baath libanais, Kassem Hachem devant un parterre des habitants des fermes des Chebaa.
La ligne bleue a été tracée par l'ONU après le retrait israélien du sud du Liban en 2000. Mais le Liban, ne reconnaissant pas Israël, n'a signé aucun accord de frontière.
Cette première manifestation de force des Libanais a provoqué la panique côté israélien, Israël ayant aussitôt demandé aux Casques bleus d'intercéder. Les Casques bleus de la Force intérimaire des Nations unies (Finul) ont alors tenté de disperser les manifestants en agitant la bannière des Nations unies.
Pour bon nombre d'analystes, il aura suffi d'un tout petit déclic pour que le front de Chebaa s'embrase et débouche sur une escalade d'envergure. Une guerre pour la libération du Golan pourrait même commencer par la libération de Chebaa. Israël a tenté de promouvoir une « zone tampon » au sud de la Syrie comme celle créée au Liban dans les années 1980, son objectif étant d’annexer de facto et en permanence le Golan et de pouvoir s’avancer de quelques kilomètres de plus dans les territoires du Sud syrien par al-Qaïda et Daech interposés. Si pareil scénario s’était réalisé, aucun pays du monde ne se serait opposé à la manœuvre d’Israël. Or, et au grand dam d’Israël, l’armée syrienne et ses alliés ont réussi à retourner la situation en reprenant tous les territoires du Sud. D'où le coup de Trump en faveur d'Israël au Golan. Pourtant, au Liban les choses ne se dérouleront pas de cette manière, la Résistance ayant passé, comme l'a bien affirmé son secrétaire général, de sa stratégie de défense passive à une stratégie offensive.