A quoi associent les jeunes Français les différentes religions?

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A quoi associent les jeunes Français les différentes religions?
L’association pour le dialogue interreligieux Coexister publie une enquête sur les mots-clés que 2 000 collégiens et lycéens associent aux différentes religions.

A quoi associent les jeunes Français les différentes religions?
Ce procédé original montre que les jeunes ont un minimum de connaissance des trois religions monothéistes, bien que certains clichés aient la vie dure.


À quoi pensent les jeunes Français si on leur dit « judaïsme », « christianisme », « islam » ou « athéisme » ? C’est à cette question que répond une enquête de l’association Coexister dont La Croix publie les résultats en exclusivité.


L’association, qui promeut le dialogue interreligieux et intervient régulièrement dans les établissements scolaires publics et privés, organise notamment un atelier consacré à la « déconstruction des préjugés » sur les religions. Lors de cet atelier, les élèves sont invités à remplir une fiche sur laquelle ils notent les trois mots qu’ils associent aux trois religions monothéistes, ainsi qu’à l’athéisme. Ils indiquent également la religion dont ils se sentent « le plus proches ».


Au fil du temps, l’association, créée en 2009, a collecté plus de 50 000 de ces fiches. « Nous avons réalisé que nous avions là une matière importante qui méritait d’être analysée », explique Samuel Grzybowski, fondateur de Coexister. En l’occurrence, ce sont les réponses de 1 896 élèves, du collège au BTS, qui ont été dépouillées et synthétisées. Pas de critère scientifique de représentativité ici, mais les convictions religieuses de ces jeunes – dont 80 % sont scolarisés dans le privé – sont assez proches de celles de l’ensemble de la population, avec 0,76 % se sentant « proches » du judaïsme, 49,2 % du christianisme, 6,53 % de l’islam et 42,61 % de l’athéisme. Que montrent donc ces réponses ?


D’abord, que les jeunes ont finalement peu de préjugés, emblématiques en cela de générations qui n’ont pas connu les grandes heures de l’anticléricalisme. « Kippa » et « synagogue » viennent en premier pour le judaïsme, « Église » et « Jésus-Christ » pour le christianisme, « mosquée », « voile » et « Coran » pour l’islam. « Cela montre qu’il y a une transmission minimale des connaissances du fait religieux », analyse Charles Mercier, maître de conférences en histoire contemporaine à l’université de Bordeaux.


De plus, les réponses les plus données sont toujours respectueuses. « Dans les top 10”, il n’y a aucun mot violent, agressif ou raciste », se félicite Samuel Grzybowski. La présence importante de « génocide » et « Hitler » dans les mots associés au judaïsme est sans doute à mettre en lien avec l’étude de la Shoah au cours de la scolarité. Seul bémol, pour Samuel Grzybowski : « Les non-musulmans écrivent systématiquement Mahomet” au lieu de “Mohammed”, alors que cette appellation est jugée péjorative par beaucoup de musulmans. »


Clichés et visions négatives transparaissent malgré tout dans les réponses, mais de manière plus marginale. « Dans ce type d’ateliers, il y a souvent une autocensure de la part des élèves, qui ont tendance à donner ce qu’ils pensent être les “bonnes réponses” plutôt que leur réponse spontanée », fait d’ailleurs observer Charles Mercier. « Radins », « Rabbi Jacob » ou « banquiers » reviennent en mode mineur dans les mots associés au judaïsme. Idem pour l’islam, auquel les jeunes répondent régulièrement « couscous », « terroristes » ou « Arabes ».


Plus marginalement, le christianisme est synonyme pour certains de « coincés », « vieux » ou encore « croisades ». À noter que l’athéisme n’est pas épargné : « ignorance », « incompréhensible » ou « indécis » figurent parmi les adjectifs qui lui sont parfois associés.


Plus intéressante est l’analyse des mots associés à une religion selon que les répondants s’en sentent proches ou pas. Sans être spectaculaires, ces différences manifestent, selon Samuel Grzybowski, que « les trois mots qu’ils associent à leur religion touchent plus souvent à l’intériorité, alors que ceux qu’ils associent aux autres religions concernent plus facilement des signes extérieurs ». Ainsi, « Jésus-Christ » est le premier mot associé au christianisme par les jeunes chrétiens, quand « Église » est celui préféré par les non-chrétiens.


Mais l’exemple le plus frappant est sans aucun doute celui du voile islamique : il est le deuxième mot le plus associé à l’islam par les non-musulmans (33,92 % des élèves le citent), alors qu’il n’arrive qu’en neuvième position chez les élèves musulmans (9,76 %). « On voit ici, explicite Charles Mercier, que ce signe extérieur, qui cristallise les débats en France, est beaucoup plus caractéristique de l’islam pour les non-musulmans que pour les musulmans ».

la-croix

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