«Semeur de désordre»: pourquoi Paris manifeste-t-elle contre la loi asile-immigration ?

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«Semeur de désordre»: pourquoi Paris manifeste-t-elle contre la loi asile-immigration ?

Le projet de loi sur l'immigration présenté par Gérard Collomb a provoqué une grogne discernable qui a poussé des foules à descendre dans la rue pour manifester mercredi 21 février. Éric Coquerel, député de La France insoumise, et Olivier Chemin, président de l'association ELENA, expliquent à Sputnik pourquoi la capitale se mobilise.

Les mesures proposées dans le texte de la nouvelle loi asile-immigration ont fait sortir de nombreux Parisiens dans les rues. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ont organisé des rassemblements pour dénoncer les propositions du ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, l'OFPRA considérant que le texte de la loi traite «à la fois des politiques de l'asile et de l'immigration» et ainsi confond les genres.

Sputnik a interrogé à ce propos Éric Coquerel, député de La France insoumise, persuadé qu'il faut s'acquitter de ses responsabilités de traiter administrativement les personnes en provenance des pays en détresse.

«Je soutiens le personnel de la CNDA et de l'OFPRA en grève et là ils se mettent en grève pour une excellente raison, c'est que ce projet de loi est irréaliste», estime-t-il. «Ce n'est pas vrai, vous pouvez mettre toutes les mesures que vous voudrez mais quand les gens quittent leur pays, risquent leur vie dans la Méditerranée et dans les cols alpins c'est qu'ils ont des raisons en plus de le faire», indique-t-il.

«Et deuxièmement, c'est irréaliste parce qu'on n'expulsera pas de France 40.000 à 50.000 personnes de plus par an parce que c'est faux pour plein de raisons qui tiennent à l'État de droit et tiennent aussi au fait qu'on ne sait même pas où les expédier», poursuit-il.

«C'est inhumain parce qu'on augmente des mesures de rétention, on abaisse les recours, on criminalise des migrants soit pour des passages frontaliers, soit parce qu'ils n'ont pas de papiers et enfin c'est semeur de désordre parce qu'en expliquant par exemple qu'on va aller jusque dans les centres d'accueil pour leur demander des papiers, on sait très bien qu'on va les pousser à rester sur le trottoir, sous les ponts, là où justement seules les associations veillent parce que l'État ne fait rien. Pour toutes ces raisons, on s'oppose à ce projet», résume M.Coquerel.

Le président de l'association ELENA, Olivier Chemin, est aussi opposé au projet de loi parce que ces mesures constituent «une régression des droits des demandeurs d'asile». On va les empêcher d'avoir accès à la procédure et après s'ils ont accès à la procédure, de pas leur permettre d'avoir accès à leurs juges, explique-t-il. Ça va être assez difficile pour eux de déposer une demande d'asile et après on réduit les délais, on passe de 120 jours à 90 jours et puis on veut faire des recours qui sont pas suspensifs:

«La loi dit: on va améliorer par exemple les droits pour les demandeurs d'asile, on va leur donner le droit au travail au bout de six mois de présence sur le territoire français. Mais ça c'est se moquer du monde parce que la loi dit que déjà en moins de six mois ils doivent avoir une réponse et s'ils sont rejetés au bout de cinq mois, ils n'auront pas le droit au travail», estime M.Chemin.

Pour lui, la mesure phare permettant de leur accorder des droits, notamment le droit au travail, est illusoire «parce qu'ils n'auront pas la possibilité d'aller jusqu'au bout des six mois parce que la loi réduit les délais: 90 jours pour faire une demande d'asile, quinze jours pour faire un recours, c'est très peu».

Surtout que les 90 jours, c'est à partir d'un moment où ils sont entrés sur le territoire français, conclut-il, soulignant qu'en région parisienne pour avoir accès à la préfecture, il y en a qui attendent beaucoup plus que trois mois.

Gérard Collomb a présenté mercredi devant le Conseil des ministres son projet de loi sur l'asile et l'immigration, visant à réduire à six mois les délais d'instruction de la demande d'asile et à faciliter la reconduite à la frontière pour les déboutés. Décrit comme «reposant sur deux principes, humanité et efficacité», selon le Premier ministre Édouard Philippe, le texte a déclenché une vague de critiques de la part de diverses associations de soutien aux réfugiés.

 Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb (à gauche) et Benjamin Griveaux sur le perron de l'Élysée, le 21 février 2018. ©AFP

Source des photos: Sputnik

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