Le Drian est attendu ce dimanche soir à Téhéran. Il espère pouvoir maintenir l'accord nucléaire tout en forçant l'Iran à négocier ses capacités balistiques.
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, arrivera à Téhéran dimanche soir pour s'entretenir avec de hauts responsables iraniens.
Au cours de sa visite de deux jours, le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian devra rencontrer le président iranien Hassan Rohani et le ministre des Affaires étrangères Mohammad-Javad Zarif pour s'entretenir des questions d'intérêt bilatéral, régional et international.
Emboîtant le pas aux États-Unis, la France est à la tête des pays européens qui exigent que le programme balistique de l'Iran ainsi que son rôle régional soient négociés.
Le ministre multiplie ses prises de position hostiles dans les médias en soutien aux positions de Riyad et de Washington.
En visite, le 27 février, en Russie, Jean-Yves Le Drian a qualifié le programme balistique iranien de "très inquiétant" et de "contraire aux résolutions de l'ONU". Il a promis même de restreindre les activités balistiques de l'Iran pour qu'il ne devienne pas "une menace pour les acteurs régionaux". C'est la question qu'il a même promis de "soulever lors de sa visite à Téhéran".
La position de Téhéran
En réaction à ce discours hostile, Ali Akbar Velayati, le haut conseiller du Leader de la Révolution islamique pour les affaires internationales, a souligné qu'aucun pays ne pouvait décider à la place de l'Iran pour sa défense nationale.
M. Velayati a réitéré que la défense était non négociable. " Il ressort du droit de toute nation de renforcer sa puissance défensive. Aucun pays y compris la France ne peut nous dicter quelle sorte de missile ou d'armes nous pouvons détenir", avait-il ponctué.
Soulignant le principe d'entente et de bon voisinage qui fondent la politique iranienne envers tous les pays du monde, Velayati a conseillé au ministre français des Affaires étrangères d'éviter de prendre de telles positions négatives s'il voulait renforcer les relations de son pays avec l'Iran.
Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Bahram Qassemi avait, lui aussi, réagi aux ingérences de la France en disant que la République islamique d'Iran ne permettrait à aucun pays d'affaiblir sa puissance défensive, surtout aux pays qui fournissent eux-mêmes des armes mortelles aux pays de la région.
La condition des négociations sur le programme balistique de l’Iran est la destruction des armes nucléaires et des missiles à longue portée des États-Unis et de l’Europe (général Jazayeri) pic.twitter.com/be9jatctwi
— Press TV Français (@PresstvFr) March 3, 2018
La mission de Le Drian en Iran
Après avoir reporté à plusieurs reprises sa visite, Le Diran se rend, ce dimanche soir, à Téhéran dans le but, disent les analystes, de parvenir à une "solution médiane" : il souhaite, d'une part, faire de sorte que le Plan global d'action conjoint soit maintenu et satisfaire, d'autre part, les exigences illégitimes du président américain Donald Trump qui a conditionné le maintien US dans l'accord nucléaire à ce que le texte soit modifié.
Existe-t-il vraiment une solution médiane?
À Téhéran, Le Drian ne recevra qu'une réponse négative dans la mesure où la RII était résolue à préserver ses capacités de défense nationale. La France devrait, plutôt, s'inquiéter pour ses investissements commerciaux en Iran, selon les experts.
La France a-t-elle réellement intérêt à emboîter le pas aux Américains?
Les deux groupes français, le géant pétrolier Total et le constructeur automobile Renault ont de larges intérêts à défendre en Iran.Total a signé en juillet dernier un accord en vue de développer la phase 11 de Pars Sud, le plus grand gisement de gaz naturel au monde. Le groupe français reste "pleinement engagé" dans ce projet évalué dans sa première étape à quelque deux milliards de dollars, comme l'a dit Patrick Pouyanné, le PDG du géant pétrolier. Aux termes de l'accord, Total est l'opérateur du projet et son actionnaire à 50,1%, aux côtés de Petropars, filiale de la compagnie nationale iranienne NIOC (19,9%) et de la compagnie nationale chinoise CNPC (30%).
Cet engagement est si large que Pouyanné a demandé en personne, lors d'une rencontre, le mois dernier à Davos, en Suisse, au président américain Donald Trump de conserver l'accord nucléaire avec l'Iran.
Quant au constructeur automobile Renault, presque mis en faillite après les sanctions imposées à l'Iran, il a signé un accord "historique" en août 2017 avec l'Iran d'une valeur de 660 millions d'euros. Grâce à ses deux marques les plus vendues en Iran, les actions de cette entreprise connaissent désormais une croissance d'ordre 3.5% à la bourse.
Signe de grands intérêts apportés par les industriels français au marché iranien, les deux groupes précités ont financé et organisé, de A à Z, une exposition du Musée du Louvre au siège du Musée national d'Iran, à Téhéran laquelle devra être inaugurée en présence du ministre iranien des Affaires étrangères et son homologue français.
En 2017, la France était le deuxième partenaire commercial de l'Iran au sein de l'Union européenne. Selon le ministère français des Finances, le volume des échanges commerciaux de l'Iran avec la France s'est élevé à 3,8 milliards d'euros.