Les chiites sont toujours confrontés à ce problème selon lequel ils dissimulent leur haine vis-à-vis des compagnons du Noble Prophète (ç) (comme l’affirment les ennemis du chiisme). Tout ceci n’est qu’une allégation loin de la vérité et nous allons l’analyser sans aucune discrimination ni fanatisme. Les chiites expriment un respect total envers les compagnons du Prophète (ç). Comment éprouver de la haine envers les compagnons alors qu’ils sont les porteurs du message et de la lumière de Dieu pour l’humanité ? Ceux-là qui ont défendu et soutenu le Prophète (ç) en combattant à ses côtés. Comment manifester de la haine envers des personnes dont Dieu a fait les éloges dans le Saint Coran : « Mohammad est le Messager de Dieu (ç) Lui et ceux qui sont avec Lui sont sévères vis-à-vis des impies et indulgents entre eux. Tu les voies s’incliner et se prosterner devant Dieu, rechercher Sa grâce et Son agrément. Les traces de prosternation se voient sur leur visage. C’est ainsi qu’ils apparaissent dans la thora et leur description dans l’évangile est comparée à une semence qui laisse sortir ses pousses, et se renforce, puis grossit et s’affermit sur sa tige. Elle fait alors la joie de celui qui l’a semée. Par les croyants Dieu suscite la colère dans les cœurs des impies. Dieu promet pardon et magnifique récompense aux croyants qui font de bonnes œuvres (utiles à la société et pour la cause de Dieu) »[1]. Les compagnons ont aidé Dieu et son Prophète (ç), instauré sa religion, fixé les bases de l’État islamique et vaincu l’obscurantisme[2].
L’Imam et le guide des chiites déclare à propos des compagnons du Prophète (ç) : « J’ai vécu avec les compagnons du Prophète (ç), mais aucun de vous ne leur ressemble. Ils se levaient très tôt, les cheveux en désordre et le visage plein de poussière. Ils restaient du soir au matin à adorer Dieu, multipliant prosternation et station débout. Ils frottaient leur fonds et leurs joues sur la terre et éprouvaient de l’inquiétude par rapport au jour du jugement comme s’ils étaient sur le feu même. Tellement ils duraient dans les prosternations que leurs front avaient finir par s’indurer (on dirait la callosité sur les genoux des chèvres). Dès qu’ils entendaient le nom de Dieu ils se lamentaient tellement que leurs cols s’enflaient et ils tremblaient comme un arbre agité par un vent fort pour le châtiment qu’ils redoutaient ou la récompense qu’ils espéraient[3]. Il dit aussi : « Où sont mes frères dans la voie de la vérité qui sont partis alors qu’ils étaient dans la vérité ? Où est Ammar ? Où est Ibn Tayhan ? Où est Zou Shahadatein ? Où sont les frères qui sont pareils à ceux qui ont prêté le serment militaire, envoyant ainsi leurs têtes dans la voie de Dieu et leur corps pour les tyrans ? Naof le rapporteur du discours : « L’Imam tint sa barbe par la main et pleura un long moment » puis dit : « Où sont mes frères qui lisaient le Coran, jugeaient selon ses préceptes, méditaient et accomplissaient leurs obligations ? Ils ont instauré la tradition divine, combattu les innovations, répondu présent à l’appel au jihad. Ils avaient foi en leur guide qu’ils suivaient »[4].
L’Imam Sadjad (as) adresse aussi des prières aux compagnons du Prophète (ç) dans Sahifat ul sadjadiyya en ces propos : « ô mon Dieu ! Fait preuve de considération et de pardon, envers ceux qui ont suivi les messagers à toute époque et à tout moment et confirmé du fond du cœur leur authenticité (alors que certains les déniaient obstinément avec des allégations). Ceux qui par leur foi sincère désiraient ardemment la venue des émissaires pour chaque Prophète (ç) ou guide que tu as envoyé pour chaque peuple (depuis Adam, le père de l’humanité jusqu’à Mohammad) les Imams qui guident sur le droit chemin, et les promoteurs de la vertu et la piété. O Seigneur ! Soit particulièrement clément envers les compagnons de Mohammad, ceux qui se sont bien comportés et ont bien agi en sa compagnie, ceux qui ont bravement passé leur soutien envers lui et réagi convenablement, ceux qui dans leur soutient envers lui ont réagi convenablement, et se sont surpassés pour répondre favorablement à son appel. Ceux-là qui se hâtèrent de lui donner l’allégeance et le soutenir pour annoncer sa parole dès qu’il leur exposa les arguments de son message. Ceux-là qui se séparent de leurs épouses et leurs enfants afin de porter haut les idéaux de l’islam allant jusqu’à se battre contre leurs pères et fils pour consolider et renforcer la mission du Prophète (ç) qui leur permit d’accéder à la victoire. Ceux qui, éprouvant de l’affection et de l’amour pour Lui avaient fait un investissement qu’ils espéraient ne pas se solder par une perte ou des dommages. Ceux qui furent bannis de leur clan parce qu’ils étaient restés attacher à lui. Ceux qui se réfugièrent en lui alors que leurs parents et proches les avaient reniés. Seigneur ! N’oublie pas ce qu’ils abandonnèrent pour Toi et par Toi et fait en sorte qu’ils se réjouissent de ton plaisir pour les créatures qu’ils purent rassembler pour Toi et conduire vers Toi. Récompense-les pour avoir abandonné leurs villes et leurs peuples pour Toi, pour avoir quitté l’abondance pour une vie austère. Montre Ta gratitude envers ceux que Tu as joints à ce groupe qui endura des difficultés et attribue à ceux qui ont suivi les pas des compagnons de Mohammad une grande récompense de valeur. O Dieu pardonne-nous ainsi que nos frères qui sont restés près de nous parce qu’ils avaient foi en Toi ».[5]
Les savants chiites ont du respect pour le statut particulier des compagnons. Shahid Sadr dit : « les compagnons ont été les portes étendards des croyants, les éclaireurs et la meilleure semence pour l’évolution de la communauté islamique, même comme l’histoire de l’humanité n’évoque pas la mémoire d’une génération de meilleurs croyants et d’élites pures parmi les compagnons que le prophète Mohammad (ç) a éduqués ».[6] Certes nous avons des divergences avec les sunnites juste parce que nous répartissons les compagnons et ceux qui ont vécu avec le prophète en catégories et selon les critères coraniques.
1 - Les groupes des premiers compagnons c’est-à-dire : « les premiers compagnons qui ont émigrés à Médine avec le Noble Prophète (ç) (Mouhajirine), ceux qui les ont reçu à Médine (Ansâr) et ceux qui les ont suivi dans le bien, Dieu est fiers d’eux et ils sont fiers de Dieu. Sont prévus pour eux au paradis des jardins sous lesquels coulent les ruisseaux sous les arbres. Il y demeureront éternellement et ça c’est un grand triomphe »[7].
2- Ceux qui ont donné l’allégeance au prophète (ç) sous l’arbre (« Dieu a été fiers des croyants qui t’ont donné l’allégeance sous l’arbre. (À Houdaybiyyah). Il connait ce qu’il y a dans leurs cœurs. Il a fait descendre sur eux la quiétude et leur a accordé une victoire proche »)[8].
3- Les donateurs et les combattants pour la cause de Dieu avant la conquête de la Mecque (« Ceux qui ont fait don avant la victoire et combattu ne sont pas pareils à ceux qui l’ont fait après la victoire. Ils ont un rang plus élevé que ceux qui ont fait don après la victoire et combattu. Dieu a fait des bonnes promesses aux deux groupes et ils est parfaitement au courant de tout ce que vous faites »)[9].
Face à ce groupe d’élites et de personnalités de valeurs, le Saint Coran évoque un autre groupe largement différent :
1- Les hypocrites[10].
2- Les hypocrites cachés dont le Prophète (ç) ne connaissait pas l’identité[11].
3- Les hommes de faible foi et de faible volonté[12].
4- Les gens moins avertis qui prêtaient l’oreille aux paroles de la discorde[13].
5- Ceux qui accomplissaient les bons et les mauvais actes en même temps[14].
6- Ceux qui ont plongé dans l’apostasie[15].
7- Les pervers dont les propos ne confirment pas les actes[16].
8- Ceux dont la foi ne s’est pas encore bien installée dans le cœur[17].
9- Il y en a parmi les compagnons du Prophète (ç) ceux qui ont voulu l’assassiner ‘’la nuit de Uqba’’[18].
On peut ainsi résumer la position des chiites vis-à-vis des compagnons du Noble Prophète (ç) :
Pour les chiites les compagnons sont des hommes ordinaires. Il y en a qui sont justes et d’autres qui ne le sont pas. On ne peut pas admettre que tous les gens qui ont côtoyé le noble Prophète (ç) étaient des gens droit. L’intégrité de quelqu’un est évaluée en fonction de sa loyauté par rapport à la voie de l’islam et non par rapport au fait d’avoir vécu la compagnie du Prophète (ç). Donc le comportement et l’attitude sont des critères de distinction des compagnons. Celui dont la vie est en règle avec les critères islamiques est juste, dans le cas contraire il n’est pas juste. Comme nous l’avons déjà signifié, cette position correspond à celle du Coran et la sunna. Est-il logique et normal de considérer au même rang de compagnon Malik ibn Nouwerah et celui qui l’a assassiné et violé sa femme la même nuit ?! On ne saurait faire les éloges d’un alcoolique comme Walid ibn Uqba ou jeter des fleurs à celui qui a transformé le gouvernement islamique en une monarchie, celui qui a tué les pieux de la communauté et combattu l’Imam et le calife légitime (Ali ibn Abou Talib (as)). Est-il normal de mettre dans un même panier Ammar Yasir et le chef des rebelles juste parce qu’ils sont des compagnons du prophète (ç) ? Pourtant le Noble Prophète (ç) a dit : « Ammar sera injustement assassiné par un groupe de rebelles et des pervers ».
Quel homme raisonnable peut admettre cela ? Et si nous cautionnons cela ne serons-nous pas en train de placer l’islam au rang des religions qui cherchent à justifier les exactions des tyrans et des oppresseurs sous prétexte qu’ils étaient les compagnons du prophète ? L’islam est au-dessus de ce genre de chose et quel que soit le lieu et le temps elle ne confondra jamais les actes des criminels et des déviés avec ceux des hommes biens. Telles sont nos convictions et nous ne faisons pas la courtoisie car la vérité mérite d’être dite et d’être reconnue. Nous demandons aux frères sunnites s’ils considèrent au même pied d’égalité le 3ème calife Ousmane et ceux qui l’ont assassiné ? S’ils sont au même pied d’égalité pourquoi tout le monde s’en est pris à l’Imam Ali (as) et orchestrés la guerre de Jamal et Séffine sous prétexte de venger la mort d’Ousmane ? Et si les deux ne sont pas égaux, ceux qui se sont dressés alors contre Ousmane et ceux qui ont participé à ce mouvement d’humeur – sans oublier ses assassins - sont considérés comme des gens qui sont sortis de la religion islamique. Ce qui revient à dire que tous les compagnons ne sont justes. Alors pourquoi autant d’acharnements contre les chiites alors qu’ils partagent le même avis que les autres musulmans.
En conclusion la justice et l’intégrité des compagnons s’évaluent selon l’engagement qu’ils ont pris de respecter la sunna du Prophète (ç) pendant et après sa vie. Tout celui qui demeure intègre dans cette voie fera l’objet de respect de notre part. Nous nous inspirerons de lui, nous suivrons son exemple et nous prierons Dieu pour qu’il le place au plus haut degré du paradis. Par contre, nous ne considérons pas ceux qui ne sont restés dans cette voie comme justes. Par exemple deux des compagnons du Prophète (ç) ainsi que l’une de ses épouses avaient engagé une armée pour affronter l’Imam Ali ibn Abou Talib (as) le successeur légitime du Noble Prophète (ç) dans la guerre de Jamal à Basra. Ils avaient engagé une bataille qui avait vu périr des milliers de musulmans. Est-il acceptable de s’insurger contre le guide légitime et provoquer la mort des milliers de gens ? Ou quelqu’un d’autre qui se dit compagnon du Prophète (celui qui a orchestré une guerre appelée ‘’guerre de Seffine’’, un évènement qui a provoqué beaucoup de troubles. Nous disons que ce genre d’acte est contraire à la législation islamique car c’est l’insurrection contre le calife légitime. On ne peut pas cautionner ces actes parce que l’auteur est compagnon du Prophète (ç). Voilà l’élément essentiel qui distingue les chiites des autres musulmans. Il est clair qu’il ne s’agit pas ici d’outrage, de haine ou de quoi d’autre que ce soit.
[1] - Sourate Fath : 28
[2] - La justice des compagnons, page 14, assemblée mondiale Ahl-ul-bayt (as)
[3] - Nahjul balagha, page 144, discours 97
[4] - Nahjul Balagha, recherche Soubhi Saleh, page 164, discours 183
[5] - Sahifat ul Sadjadiyya, page 42, prière sur les suiveurs des Prophètes (as)
[6] - Majmout ul Kamilah, numéro 11, sujet sur la wilaya, page 48
[7] - Sourate Tawba : 100
[8] - Sourate Fath : 18
[9] - Sourate Hadid : 1
[10] - Sourate Mounafiqoune : 10
[11] - sourate Tawba : 101
[12] - Sourate Ahzab : 11
[13] - Sourate Tawba : 45-47
[14] - Sourate Tawba : 102
[15] - Sourate Ali Imran : 154
[16] - Sourate Hujrât : 6, sourate Sadjda : 18
[17] - Sourate Houjrât : 14
[18] - Fousoul al Mouhima, Abdou al Hossein Sharaf dine, page 189.