L’armée américaine pourrait connaître une deuxième année consécutive d’échec à atteindre ses objectifs de recrutement.
Malgré l’assouplissement des restrictions, l’ajout de nouvelles « incitations » et le déploiement de campagnes promotionnelles massives, diverses unités de l’armée américaine ont du mal à recruter du nouveau personnel. Il s’agit d’un signe non seulement de la santé mentale et physique déclinante des Américains, mais aussi d’un mépris croissant pour les guerres des États-Unis.
Beaucoup d’experts ont décrit l’incapacité à atteindre les objectifs de recrutement de l’armée comme une « crise ». Après tout, il n’y a pas si longtemps, les Américains affluaient vers les centres de recrutement. Le début des années 2000 a vu l’une des plus fortes augmentations du nombre de militaires.
En 2022, l’armée américaine a raté son objectif de recrutement d’environ 15 000 soldats. Dans le but d’atteindre ce niveau de recrutement, l’armée américaine a investi 100 millions de dollars dans des écoles destinées à pousser les recrutements potentiels vers une forme mentale et physique. Cependant, il y aura encore un risque d’échouer.
Pour sa part, la marine américaine n’a pas non plus atteint ses objectifs de recrutement en 2022. C’est seulement en réduisant considérablement une partie des conditions requises à rejoindre la marine -qui inquiète le Congrès- qu’il se peut que la marine atteigne ses objectifs.
Malgré la baisse de ses conditions requises, l’armée de l’air américaine n’a pas réalisé ses objectifs de recrutement au cours de cette année.
Qu’est-ce qui pourrait amener la plus grande armée du monde à faire face à une crise sans précédent, surtout maintenant que les États-Unis se préparent potentiellement à une guerre contre la Chine, tout en essayant d’augmenter leur présence militaire en Asie occidentale et en Afrique ?
Tout d’abord, les critères de condition physique sont en danger. La santé des Américains décline tout simplement. Dans une note publiée l’année dernière par le chef d’état-major des forces armées américaines, seuls 23 % des Américains âgés de 17 à 24 ans sont qualifiés pour servir.
Les aliments de mauvaise qualité, la mauvaise qualité d’éducation physique ainsi que la « glamourisation » des modes de vie sédentaires ont mis en danger la santé de millions de personnes. Les médecins sont même allés jusqu’à parler de crise de santé publique.
Mais plus important encore, les Américains cibles de projets de recrutement sont-ils d’accord avec les guerres orchestrées par le complexe militaro-industriel américain ?
La plus jeune recrue de l’armée, homme de 18 ans, est née en 2005, au début de l’invasion et de l’occupation illégale de l’Irak par les États-Unis, où ils ont commis des actes de terreur brutaux en Afghanistan. Alors qu’ils allaient à l’école, les bombardements illégaux de l’OTAN sur la Libye ont commencé. Au moment où ils sont allés au lycée, les États-Unis étaient déjà en Syrie sans invitation.
Une existence entourée de guerre, et qu’est-ce que les États-Unis doivent faire pour cela ?
En Irak et en Syrie, les États-Unis ont créé un vide de pouvoir qui a conduit à la montée du groupe terroriste Daech. La destruction de la Libye en a fait un marché aux esclaves. Les États-Unis ont fui l’Afghanistan, donnant toutes leurs armes et leurs bases aux talibans, groupe qu’ils avaient passé deux décennies à combattre [la plus longue guerre dans l’histoire des Américains].
Tandis que les États-Unis portent un coup à leurs principaux rivaux mondiaux, à savoir la Chine et la Russie, un jeune Américain sensé et informé devrait se demander si cela en vaut vraiment la peine ?
Il n’est pas surprenant que Washington ait recours maintenant à d’autres moyens pour attirer des recrues les plus talentueuses, car la propagande de guerre ne suffit plus comme elle l’était il y a 20 ans.
Une récente décision controversée de la Cour suprême des États-Unis élimine l’action positive qui offrait aux minorités une voie équitable pour entrer à l’université, compte tenu des problèmes de racisme systématique dans le pays. La Cour suprême l’a jugé « non constitutionnel », sauf pour ceux qui ont servi dans l’armée.
Désormais, seuls les militaires bénéficient d’un parcours plus facile, ce qui rend l’armée plus attrayante pour s’enrôler.
Il y a aussi la crise migratoire déclenchée par les tentatives de déstabilisation des États-Unis, y compris la guerre économique et les menaces de coup d’État.
Pourtant, les migrants ont pu conclure un accord avec le diable et obtenir la citoyenneté américaine tant qu’ils servent dans l’armée de ce pays.
Le plus méprisable de tous est peut-être les efforts de l’armée américaine dans le but de blanchir les guerres impopulaires déclenchées par les États-Unis. Ces dernières années, Hollywood a sorti de nombreux films qui sont principalement basés sur les récits des soldats au lieu de se concentrer sur la guerre.
Par exemple dans le film « American Sniper », toute l’humanité est retirée à celui qui reçoit le canon, et le soldat est présenté comme une personne aimable, faisant référence à l’aliénation que les Américains ressentent dans la société.
Il ne faut pas oublier les jeux vidéo. En gamifiant les crimes de guerre et en s’abstenant commodément des actes répréhensibles, l’armée américaine efface non seulement la sombre histoire de ses crimes, mais la rend plus séduisante pour les jeunes joueurs sans méfiance.
Le processus infâme de recrutement a toujours commencé tôt, quand des militaires entrent dans les écoles secondaires pour démontrer que l’armée était un « cheminement de carrière ».
Ne vous méprenez pas : le non-respect de ses effectifs se traduira par des pratiques de recrutement encore plus agressives. Les Américains connaîtront probablement une présence militaire plus engagée dans les défilés, les événements sportifs, les concerts, les films, etc.
L’armée se réinvente activement pour refléter les valeurs « progressistes », dans l’espoir d’exercer « l’image des États-Unis » sur le reste du monde. Cela impliquera d’abord de blanchir sa longue liste de crimes, ce qu’il fait déjà avec acharnement à travers les obstacles médiatiques.
Maintenant la question est de savoir si les Américains seront capables de voir à travers la propagande, ou vont-ils répéter les actions des générations précédentes face au bellicisme continu de Washington ?
Shabbir Rizvi est un analyste politique basé à Chicago, spécialisé dans la sécurité intérieure et la politique étrangère des États-Unis.