- La société polluée par les péchés.
- Les préjudices de la médisance dans la sociéte.
- Les causes de ce mal et son traitement.
- La religion combat la corruption morale.
Sans doute, les sociétés contemporaines sont- elles atteintes par les perversions morales, et submergées par le flot de la corruption. Elles se sont dégradées moralement en proportion des progrès accomplis sur la voie de la garantie des moyens matériels de leur vie. Les maux s’y accroissent de jour en jour, rendant le milieu, intoxiquant et pénible.
Cherchant à fuir cette fatalité à tout prix, les gens se battent à tort et à travers et vont se réfugier dans les fanges du vice, dans l’espoir d’exorciser la douleur morale, les soucis, et l’agitation. Comment les rayons du bonheur pourraient- ils réchauffer une telle société?
C’est à croire que certains, libérés de tout lien et de toute entrave, rivalisent à qui oeuvrerait le plus à hâter le pourrissement.
Au fond ils se servent à mauvais escient des moyens du progrès sans cesse innovés qu’offre la vie moderne. Bref, le matérialisme est devenu l’axe des aspirations, et le spectre effarant du vice étend son emprise funeste sur toute la société. Si au moins une partie de cette richesse innombrable dépensée dans l’égarement et la perdition, était consacrée à l’élargissement du cadre moral!
Bien que les règles morales soient immuables et imprescriptibles par essence, elles sont cependant soumises au danger d’altération et de transformation, rendues conformes au goût du jour. Il va sans dire que tant que la vertu ne sera pas le critère de la personnalité dans une société donnée, les individus adhèreront à l’esprit du temps, et suivront tout ce qui aura reçu l’agrément de l’écrasante majorité, sans en réfléchir sur les conséquences néfastes.
Il faut se dire que la culture et la civilisation contemporaines ne pourront pas instaurer une morale authentique, ni garantir le bonheur de la société et sa réforme.
Le célèbre savant français, le docteur Alexis Carrel dit à ce propos:
«Nous avons besoin d’un monde dans lequel chacun de nous pourrait s’assurer une place convenable dans la vie, tant au plan matériel que spirituel, et apprendre à vivre. Car nous comprenons à présent, qu’il est périlleux d’emprunter le chemin de la vie sans boussole. Et il est étonnant que compte tenu de cette menace nous ne nous sommes pas encore mis à la recherche des moyens permettant une vie rationnelle.
Et en réalité, ceux qui ont pris conscience de ce danger sont en nombre très restreint. La plupart des gens vivent en suivant leurs instincts, et demeurent dans un grand étourdissement; malgré les moyens fournis par la technologie matérialiste, et ne sont pas prêts de renoncer à ces avantages de la civilisation.
A l’image d’un fleuve qui dévalerait ses eaux vers des lacs et des marais, les hommes suivent la pente de leurs désirs qui les fera choir finalement dans toutes les abjections, tout comme de nosjours, elle les a menés au lucre, et à la satisfaction des bas- instincts, et aux distractions.
Les hommes se sont créés de nouveaux besoins, et prennent toutes les peines pour les satisfaire. Aux Côtés de ces besoins, il est des envies plus faciles à contenter, comme la médisance, la diffamation,les sophismes...qui sont plus dangereux pour eux que l’alcool.»
L’un des fléaux sociaux que nous allons examiner ici est la médisance. Nul besoin pour nous d’en rappeler le sens lexical. Tout le monde le connaît;
Les méfaits de la médisance:
Le premier à souffrir de la médisance est la personnalité même de celui qui médit. Ceux qui détournent leurs âmes de leurs sens naturel finiront par perdre l’équilibre de la pensée, et la discipline morale.
En divulgant les secrets des gens et en dévoilant leurs défauts de caractère, ils blessent bien des coeurs.
La médisance sape l’édifice élevé de la vertu, fait s’évaporer les qualités excellentes des hommes en un rien de temps, et dévore les racines de la vertu dans les coeurs mêmes des gens qui médisent. Bref, ce défaut répugnant dévie la bonne reflexion et ferme les portes à la raison et à la compréhension.
Au niveau social, la médisance cause des ravages que l’on ne saurait circonscrire, et est le principal agent de l’inimitié et de la haine entre les individus, au point que lorsqu’elle s’étend plus encore, elle peut jeter l’opprobre sur le prestige et le crédit d’une nation entière. Ce défaut cause un écart irrémédiable dans les rangs des hommes.
Malheureusement nous devons reconnaître que le marché de la médisance, s’est bien achalandé de nos jours. Cette mauvaise habitude s’est insinuée entre les différentes catégories sociales.
Actuellement, tout comme les nouvelles concernant les divers évènements de par le monde se propagent partout les perversions et les déviations morales et psychologiques se répandent à tous les niveaux de l’échelle sociale, avec la même vitesse.
Le cadre de la médisance s’étant aujourd’hui élargi, nous constatons que le désepoir et le pessimisme assombrissent de plus en plus les esprits et les visages des hommes, qui ont perdu toute confiance réciproque.
Et les choses demeureront telles quelles. Tant que les esprits ne seront pas éclairés par la lumière de la fraternité;, il n’y aura ni pureté, ni unité.
Une société qui ne bénéficie pas des faveurs d’un haut sens moral restera éloignée à jamais des avantages d’une vie authentique et riche.
Les causes de ce mal et son traitement:
Bien qu’elle fasse partie des péchés pratiques, la médisance est en relation directe avec l’âme humaine.
Elle traduit une agitation et un trouble psychologique grave, dont les causes doivent être recherchées dans les replis de l’âme et du coeur.
Les moralistes en citent plusieurs motifs, les principaux étant l’envie, la colère, l’orgueil, la susceptibilité. Sans doute tous les actes de l’homme, à l’instar de toute ses empreintes sur son environnement, procèdent- ils de différents états qui surviennent en son for intérieur. Et dès que l’occasion est donnée à l’une des causes mentionnées qui couvent en l’homme, comme la braise sous la cendre, la langue contrevenant à son rôle de gardienne des secrets du coeur se délie pour la médisance.
Lorsqu’un mauvais trait de caractère s’incruste en l’homme, il voile son regard et arrive graduellement à gouverner l’ensemble de ses pensées. Si la médisance est si courante, c’est à cause de l’indifférence des hommes aux mauvaises conséquences de leurs actes qu’ils répètent sans cesse car nous voyons que beaucoup de personnes s’abstiennent de commettre les autres péchés, mais commettent sans remords celui grave de la médisance. La répétition machinale de cet acte entraîne l’homme dans une situation où il ne pourra plus se retenir de faire ce que lui suggère son âme charnelle, quand bien même il en connaîtrait l’affreuse conséquence.
Au niveau du savoir et des connaissances, l’homme cherchant de par sa nature la perfection, reconnaît quelque peu les vérités; pourtant il se refuse à mettre en pratique ces connaissances, et ne se donne aucune peine pour accéder au bonheur. C’est pourquoi, il est la victime de son vil désir.
Ceux qui n’attachent pas de prix à respecter l’honneur d’autrui, ne se plient pas à la loi de la morale.
Consacrer sa vie à la satisfaction des instincts, en transgressant les droits des autres, est la misère morale même.
La faiblesse morale résulte de la faiblesse de la foi, et la naissance des valeurs morales tout comme leur permanence est liée à la croyance; et sans le soutien de la foi, l’homme ne comprendrait jamais pourquoi il devrait aimer la vertu ni s’y vouer corps et âme.
Chacun, selon ses capacités, se fait son opinion de la façon de préserver les hommes de l’égarement et de la corruption morale.
La solution la plus probante en la matière consiste à faire naître chez les gens mêmes, la nécessité de l’autoédification.
Il faut réveiller chez eux le sentiment du bien et les inviter à répondre positivement à l’appel de leur nature profonde et à ne dépenser leurs réserves intellectuelles que dans la voie du bonheur.
Il est en effet possible de venir à bout des vices moraux, d’ecarter les voiles des ténèbres, et de les remplacer par des valeurs sublimes, en portant davantage notre attention sur les mauvaises conséquences de nos actes, et en renforçant notre volonté.
Le docteur Jago écrit dans son livre intitulé: «La force de la Volonté».
«Quand nous voulons combattre une habitude détestable, nous devons nous représenter constamment à l’esprit ses conséquences dangereuses puis imaginer l’avantage et l’intérêt qu’il y aurait à abandonner la dite habitude, et se rappeler les scènes et les différents cas où nous- mêmes en avons été victimes.
Quand nous nous serons représentés ces scènes, nous cesserons d’être sous l’effet de cette habitude préjudiciable, et nous éprouverons un sentiment de plaisir à nous en être déchargés.»
Étant donné la capacité virtuelle de perfection en l’homme, qui est doté de tous les moyens pour se préserver de l’errement, nous devons diagnostiquer les causes de la dépravation puis, à l’aide de la volonté inébranlable les éradiquer du coeur, et créer par la suite un barrage devant nos inclinations incessantes.
Les actes des hommes sont révélateurs de leur dignité réelle, de leur personnalité. Si l’homme aspire au bonheur, il doit purifier ses actes, empreintes qui demeureront les points lumineux de son existence. Il doit garder constamment à l’esprit que Dieu est témoin de lui et redouter le châtiment de l’au- delà, sûr que son moindre geste est enregistré par la Providence.
Aux dires d’un philosophe:
«Ne dites pas que l’univers est sans intelligence et sans conscience, car ce faisant, c’est à vous- mêmes que vous attribuez cette incapacité.Si le monde était mort et sans esprit comme vous le pensez seriez- vous intelligents et conscients?»
La société a besoin des nécessités fondamentales, ainsi que de l’affection entre ses individus, les deux concourrant à assurer sa survie physique et spirituelle. Si l’homme prenait en charge toute sa lourde responsabilité, il tirerait le plus grand profit des valeurs morales dans le sens de la perfection.
Pour faire face aux penchants nuisibles, faisons croître en nous les pensées sublimes qui seules permettent de sortir des ténèbres à la lumière, et gardons nos langues de la médisance, comme premier pas vers le bonheur.
Pour contenir le flot de la corruption qui menace de submerger la société, il nous incombe de susciter une renaissance des valeurs morales, grâce auxquelles nous réapprendrons le respect des droits d’autrui, et nous inculquerons les principes de l’humanisme.
La consolidation des bases éthiques est le premier symbole de la permanence de la société. En provoquant une réforme en l’homme, sa capacité d’admettre les vérités se renforce, entraînant l’engagement de tous aux conventions sociales et morales.
La religion combat la corruption morale.
Le Coran décrit la réalité de la médisance en termes frappants et lapidaires:
«L’un de vous aimerait-il à manger la chair de son frère mort?..»74
Tout comme la nature de l’homme répugne à l’idée même de manger la chair d’un mort, son esprit doit avoir en horreur la médisance.
Les grands chefs de la religion ont mis autant de force à combattre l’impiété et l’athéisme qu’à corriger et à consolider les sentiments et les qualités morales.
La Prophète- que le salut de Dieu soit sur lui et sur sa Famille- a dit:
«J’ai été missionné pour parachever les nobles fondements de la morale.»75
C’est la raison pour laquelle il a convié l’humanité entière à suivre les vertus enseignées avec véhémence par l’Islam, qui a fait de la transgression des règles de la vertu, un crime très blâmé.
Médire et écouter la médisance sont un crime qu’il est du devoir du musulman qui en est témoin de réprouver. Le Prophète a dit:
«Si dans une assemblée vous êtes témoins d’une médisance contre un homme, soyez ses défenseurs, et montrez votre désapporbation de la personne médisante, puis quittez l’assemblée.»76
«Quiconque défend en son absence, l’honneur de son frère en religion, Dieu le préservera du feu de l’Enfer.»77
«Pendant 40 jours, Dieu n’acceptera pas la prière et le jeûne de quiconque aura médit d’un musulman, à moins que ce dernier lui pardonne.»78
«Quiconque médit sur un musulman, au mois de Ramazan, ne sera pas récompensé pour son jeûne.»79
Le Prophète a aussi défini le musulman d’après son comportement envers son frère en religion:
«Le musulman est celui dont les frères n’ont à redouter ni la langue ni les actes.»80
Il est clair que celui qui ouvre sa bouche pour médire de son frère musulman, transgresse, ce faisant les règles de la vertu, et se rend responsable d’un crime aux yeux de l’Islam et de l’humanité. Les Ulèmas sont unanimes à compter la médisance parmi les grands péchés. Car celui qui en est l’auteur contrevient aux ordres de Dieu en piétinant les droits de Ses créatures, et en ignorant les droits du Créateur.
Comme un corps inanimé qui ne peut se défendre, ni repousser l’agression contre lui, l’absent, objet de la médisance ne peut pas défendre son honneur et sa réputation. L’honneur de toute personne mérite autant de considération que sa vie; nul n’a le droit de bafouer cet honneur.
Médire sur ses semblables traduit souvent un état de tension nerveuse. L’Imam Ali, l’Emir des Croyants-que la paix soit sur lui- disait:
«La médisance est l’effort de l’incapable.»81
Plus proche de nous, le Dr. Helen Schachter écrit:
«Tout besoin non satisfait engendre contrariété et frustration, qui exigent d’être compensées par n’importe quel moyen. Chacun a sa propre réaction pour écarter et surmonter la douleur psychologique résultant d'un échec. Voyant que les gens ne s’intéressent pas à lui, comme il s’y attend, le sujet préfèrera s’isoler plutôt que de se mêler à la foule et s’abstiendra de la fréquenter de peur de faire l’objet d’un mépris. Dans une réunion, il s’assoiera dans un coin déçu, perplexe et timoré. Dans une autre réaction, il fera le pitre, dira des plaisanteries mal- placées et rira sans raison. Ou encore, médira des absents se querellera avec les présents, et contestera tout, pour s’affirmer ainsi devant eux.»
De son côté, le Dr. Mann écrit dans son ouvrage intitulé: «Les fondements de la psychologie.»:
«Pour réparer nos revers, et dissimuler nos défauts, il nous arrive d’attribuer la responsabilité du péché à d’autres que nous- mêmes, avec l’illusion d’avoir préservé ainsi notre dignité. Quand nous échouons à nos examens, nous blâmons l’enseignant ou les questions de l’examen. Et quand nous n’atteignons pas un rang que nous avons ambitionné, nous le déprécions ou déprécions la personne à qui il a échu., Parfois aussi nous imputons la responsabilité de notre déconvenue à d’autres qui en réalité n’y sont pour rien.»
Nous concluons de tout cela qu’il faut promouvoir en soi les sentiments élevés par l’effort de purification de l’intention, et commencer par la réforme et l’éducation de soi- même pour créer le terrain favorable à notre bonheur et à la réforme de la société dans tous ses aspects.