Le fait nouveau dans le conflit syrien ce sont les affrontements de plus en plus fréquents et de violence intense qui opposent les opposants au régime de Bachar El-Assad. Des combats ont lieu en effet depuis quelque temps entre combattants de l'Armée libre syrienne, bras armé de la coalisation de l'opposition au régime qui bénéficie de l'appui des puissances étrangères regroupées dans le club des « amis de la Syrie », et les groupes jihadistes composés de mercenaires étrangers venus se battre à leur côté.
Dans un premier temps, la coalisation et l'ALS ont accueilli à bras ouverts ces jihadistes dotés d'un armement sophistiqué et supérieurement aguerris. Ils ont ignoré les mises en garde qui leur ont été adressées sur cette alliance contre nature qu'ils ont nouée avec ces groupes qui ne scellaient pas leur appartenance à la nébuleuse salafo-terroristes d'El-Qaïda et la nature du projet politique pour lequel ils sont venus se battre en Syrie. Sur le terrain, leur alliance a laissé place à une lutte pour le leadership de l'opposition armée au régime qui a commencé à tourner à l'avantage des jihadistes qui ont dès lors jeté le masque en imposant dans les zones tombées sous leur contrôle un ordre et des préceptes qui augurent du régime rétrograde et autocrate qu'ils veulent voir s'instaurer après la chute de Bachar El-Assad.
Cette tournure des événements sur le terrain a accentué la crainte parmi les alliés occidentaux de la coalition de l'opposition syrienne de voir celle-ci débordée et surclassée. D'où leur hésitation à fournir à celle-ci l'armement qu'ils lui ont promis, car confrontés au risque de le voir tomber aux mains des jihadistes dont les organisations auxquelles ils appartiennent sont classées par eux sur la liste des groupes terroristes menaçant leurs sécurités nationales respectives.
C'est pour donner un gage à ses alliés occidentaux que l'ALS a décidé d'engager la confrontation avec les jihadistes. Elle a été d'autant contrainte de les combattre qu'elle s'est rendu compte que leurs agissements à l'encontre de la population font que celle-ci est en train de perdre ses illusions sur l'ensemble de l'opposition armée au régime. Ce qui est tout bénéfice pour ce régime qui voit ses ennemis occupés à se combattre, lui facilitant ainsi la tâche de reconquérir les régions et localités tombées sous leur coupe quand l'entente régnait dans leurs rangs.
Tout en maintenant leur soutien à la coalition de l'opposition syrienne, les Occidentaux inquiets par la tournure des événements qui sont au désavantage de leurs protégés n'excluent plus aussi fermement la possibilité d'une solution politique incluant Bachar El-Assad et son régime. Ils ont pris conscience que continuer à vouloir une solution militaire au conflit, revient à renforcer l'emprise des groupes jihadistes sur la rébellion anti-régime ce qui sonnerait le glas de la perspective de voir leurs protégés s'engager en position de force dans l'après-Bachar El-Assad.
Les «amis la Syrie» dont la responsabilité dans la militarisation à outrance du conflit syrien a été patente, ont néanmoins réussi l'objectif secret qu'ils ont poursuivi en s'y impliquant. Celui d'avoir signé l'arrêt de mort d'une Syrie unie dans laquelle les communautés ethniques et religieuses la composant vivaient en harmonie et dans la tolérance pour leurs différences et particularités respectives. Le schéma irakien se renouvelle en Syrie et n'a pas fini de s'étendre aux autres pays de la région. Le plan du grand Moyen-Orient est toujours d'actualité pour ce qui est sa visée fondamentale: engendrer le «chaos» d'où sortira une configuration qui effacera les Etats nations du monde arabe tels qu'ils ont été enfantés par les fameux accords «Sykes-Picot» de sinistre mémoire.