Le monde bien-pensant est en émoi et s'interroge: que vient, encore, de faire la Corée du Nord? Pyongyang aurait commis le crime inexpiable de lancer une fusée, sans l'autorisation expresse des "justes".
Le propos est, à peine, caricatural. Certes, le régime communiste autocrate nord-coréen est peu sympathique - il fait, d'ailleurs, ce qu'il faut pour cela - et s'est de lui-même mis en marge du monde. Il n'en reste pas moins que ceux qui blâment la Corée du Nord - ou encore, l'Iran ou tout pays déviant de «l'Ordre établi» et de la voie tracée - sont ceux-là qui ont mis le monde au bord de l'abîme. Ainsi, les recherches indépendantes, dans les domaines de la science et de la technologie de pointe, qui ne sont pas «autorisées» ou non contrôlées par eux, deviennent suspectes aux yeux des autoproclamés «gardiens du temple». Il y a, ainsi, une sorte d'exclusivité de la connaissance et du savoir-faire scientifique et technologique, qui sont réservés. Il faut être crédule, pour croire que les recherches pointues, dites civiles, n'aboutissent pas [à un moment ou à un autre] à leur maîtrise militaire. C'est là que le bât blesse et c'est la raison essentielle, pour laquelle l'Iran s'est vu interdire de pousser plus avant son programme nucléaire civil, aussi inoffensif soit-il, dès lors qu'il lui donnera, à terme, de rejoindre des pays, comme le Japon, la Corée du Sud, l'Allemagne - pour ne citer que ceux-là - qui disposent du savoir-faire nucléaire, comme de fabriquer la bombe atomique, en cas de besoin. La différence est que ces pays sont du «bon côté» et agréés par lesdits «gardiens du temple», en fait, les Etats-Unis. Ce n'est le cas, ni de l'Iran, ni de la Corée du Nord, pour nous en tenir à ces références. Ainsi, des pays ont des droits sur la connaissance et le savoir-faire nucléaire, balistique, spatial - pour nous en tenir à ces vecteurs stratégiques, qui font problème - et d'autres pas. L'Iran a soutenu, depuis des années, que son programme nucléaire est un programme civil. En vain! La Corée du Nord, pour sa part, n'a jamais caché ses objectifs militaires, annonçant, haut et fort, ses essais nucléaires. Le dernier en date, le 6 janvier 2016. Ceux qui décident qui fait quoi ont refusé d'en prendre acte, exigeant de Pyongyang qu'il démantèle son programme nucléaire militaire. Or, le fait est là: que ces bombes soient réelles ou fictives, elles ont, de fait, une existence virtuelle, qui constitue un élément de dissuasion congru. Exactement, comme Israël, qui ne confirme, ni n'infirme la possession de bombes atomiques, (au moins, 180 ogives nucléaires, selon les experts). Ce qui est normal, pour Israël, [qui a le droit de se «défendre», dixit les Etats-Unis] ne l'est pas, sûrement pas, pour la Corée du Nord. Aussi, ceux qui condamnent, fermement, le régime communiste, n'ont pas été aussi durs avec le Pakistan et l'Inde, qui ont forcé les portes du «club atomique», en mai 1998. Bémol, ces deux pays sont des «amis». Une admonestation a suffi, et l'on n'en parla plus. Dimanche, la Corée du Nord annonça qu'elle a tiré un lanceur spatial, équipé d'un satellite d'observation terrestre. Ce n'est pas l'avis de son «frère» ennemi sud-coréen, qui affirme que Pyongyang a lancé un missile balistique, de longue portée. En réalité, la question est ailleurs: un pays a-t-il le droit de faire des recherches spatiales et procéder au lancement de sondes et autres satellites, ou est-ce, là aussi, un «domaine réservé»? Perdant son sang-froid, le secrétaire général de l'ONU, le Sud-Coréen, Ban Ki-moon, emboîtant le pas à la colère des dirigeants de son pays, n'a pas su raison garder, qui reprenait à son compte les accusations de «provocation». M.Ban a, ainsi, estimé, «profondément déplorable», ce tir, qui viole, selon lui, les résolutions de l'ONU, appelant la Corée du Nord à «cesser ses actions provocatrices et à respecter, à nouveau, ses obligations internationales». Nous n'avons pas entendu le secrétaire général de l'ONU apostropher, de la même manière, Israël, qui faillit, en 2014, mettre le feu aux poudres, en procédant, de manière criminelle, en mer Méditerranée, à des essais de missiles. Or, les experts sont sceptiques et ne croient pas que la Corée du Nord ait la capacité de frappe continentale crédible, estimant que ce pays a, encore, des années de travail, pour que sa dissuasion soit opérationnelle. Subséquemment, où est le problème, dès lors que les «bombes» nord-coréennes, c'est de la pacotille? Ce qui n'est pas le cas d'Israël, qui, en 1989, lança, en direction de la Libye, un Jéricho II, qui a parcouru plus de 1.300 km, avant de s'échouer, à 400 km au Nord de Benghazi. Nous n'avons pas retrouvé trace de condamnation de cette action criminelle du fait de l'ONU et de ceux qui pointent du doigt Pyongyang et ferment les yeux sur les activités répréhensibles d'Israël. Or, si danger il y a, c'est bien celui d'Israël, un Etat hors la loi, qui échappe à tout contrôle, et sur lequel l'ONU n'a aucune garantie. Aussi, reste la question primordiale: à quoi sert l'ONU?