Le calendrier musulman comporte deux fêtes majeures : La fête de l’Aïd-Al-Fitr, “la fête de la rupture du jeûne”, appelée aussi Aïd al-Seghir, “la petite fête” qui marque la fin du mois deRamadan et la fête de l’Aïd-Al-Adha, “la fête du Sacrifice”, également appelée Aïd al-Kabîr, “la grande fête”, qui marque la fin de la période du pèlerinage à la Mecque, l’un des cinq piliers de l’islam.
2 – Quelle est la signification de la fête du sacrifice pour les musulmans ?
Cette fête commémore le sacrifice que Dieu demanda à Abraham (Psl) pour tester et éprouver sa foi. Dans la tradition musulmane, Abraham (Psl) le père des prophètes est nommé “Abraham Al-Kalil”, c’est-à-dire l’ami fidèle de Dieu. Il était l’ami fidèle de Dieu et pourtant c’est à lui que Dieu fera vivre l’épreuve la plus difficile qui soit : sacrifier son fils unique Ismaël (Psl), né de son épouse Hajar (Agar) au nom de sa foi. C’est bien plus que de se sacrifier soi-même ; c’est davantage que de vivre une épreuve de la vie, un échec, un drame, voire un accident ; c’est autrement plus difficile qu’une séparation, une maladie ou la perte d’un être cher. Abraham (psl) et son fils se sont unis pour se soumettre à la volonté de Dieu. Abraham tente alors d’immoler Ismaël (Psl) avant d’être stoppé par l’archange Jibril (Gabriel) et Ismaël fut remplacé par un bélier. Abraham (Psl) devait chosir entre entre l’amour de Dieu et l’amour de son unique enfant, à ce moment précis. Il a choisi l’amour de Dieu qui lui rend son fils Ismaïl (Pls).
Les musulmans commémorent cette épreuve des deux amours en sacrifiant un animal.
3 – Quel est le statut de la fête du sacrifice en islam ?
La majorité des savants musulmans est d’avis qu’il s’agit d’une tradition non obligatoire. Dans l’école malikite, en vigueur dans les pays du Maghreb et en Afrique de l’Ouest, le sacrifice est considéré comme une tradition prophétique très recommandé pour les musulmans qui disposent de moyens financiers pour le faire. Le musulman n’a pas à s’endetter pour acheter une bête pour le sacrifice. Pour l’école hanafite, en vigueur en Turquie notamment, le sacrifice constitue une obligation.
4 – Comment est fixée la date de la fête du sacrifice ?
Les fêtes musulmanes sont fixées en fonction du calendrier lunaire[1]. La fête du sacrifice est célébrée le dixième jour du dernier mois de l’année lunaire, au lendemain du rassemblement de millions de pèlerins[2] sur le mont d’Arafat[3]à La Mecque. La date de l’aïd al-Kabîr, comme celle du début ou de la fin du ramadan, “recule” de onze jours environ chaque année dans le calendrier civil.
5- Les musulmans fêtent-ils tous l’Aïd le même jour ?
Théoriquement oui, car c’est l’Arabie Saoudite, où se déroulent les rites du pèlerinage, qui fixe le 1er jour de la fête du sacrifice. La date de cette fête qui marque la fin du pèlerinage et qui est fixée par le calendrier lunaire n’est connue et confirmée qu’une dizaine de jours auparavant[4]. Cela étant dit, pour certains pays comme la Turquie qui ont adopté le calcul scientifique, la date est connue à l’avance. En France, c’est le CFCM qui fixe la date du premier jour du sacrifice. Il s’est toujours aligné sur l’Arabie Saoudite.
6 – A quel moment de la journée doit débuter le sacrifice ?
Le sacrifice doit commencer le matin du jour de la fête, après la prière spéciale de l’Aïd qui commence 20 minutes environ après le lever du soleil. La bête tuée avant la prière de l’Aïd n’est pas considérée comme un sacrifice, même si elle reste halal et donc propre à la consommation. Il est permis de sacrifier de jour comme de nuit, mais il est préférable de le faire de jour.
7 – Combien de jours dure la fête ?
L’Aïd-al-adha est une fête qui dure 3 jours. En France, elle est fêtée plus communément le 1erjour par les familles de confession musulmane, mais elle peut également s’étaler le 2ème et 3ème jour suivant la prière spéciale de l’Aïd, abattage de l’animal compris. De ce fait, de plus en plus de familles acceptent pour des raisons logistiques de récupérer l’animal abattu le 2ème ou 3ème jour.
8 – Quels sont les mérites du sacrifice pour les musulmans ?
Pour avoir une idée de ce que représente cette fête pour les musulman, il suffit de lire cette parole du prophète : “Il n’y a pas une œuvre plus agréable auprès de Dieu que l’homme puisse accomplir le jour du sacrifice que de sacrifier une bête. Celle-ci est amenée le jour de la résurrection avec ses cornes, ses poils et ses sabots ; son sang atteint une place élevée auprès de Dieu, avant même qu’il ne touche le sol. Réjouissez-vous-en !”.
9 – Quel type d’animaux faut-il sacrifier?
Dans la tradition musulmane, le choix des animaux pouvant être sacrifiés pendant la fête est multiple : les musulmans peuvent tuer un ovin (mouton, brebis ou bélier), un bovin (vache, taureau ou veau), un caprin (chèvre ou bouc) ou encore un camélidé (chameau ou dromadaire).
10 – Quels sont les choix des musulmans de France ?
En France, il s’agit en général d’un mouton ou d’une chèvre pour les musulmans originaires du Maghreb et d’Afrique de l’Ouest et d’un un veau pour ceux originaires de Turquie.
11 – Est-il possible à plusieurs familles de s’associer pour sacrifier une seule bête ?
L’Islam autorise un groupe de sept familles (au plus) à s’associer pour sacrifier un veau ou une vache.
12 – A quelles caractéristiques précises doivent répondre les bêtes?
Les animaux doivent répondre à des conditions liées à l’âge et à l’intégrité physique. Ainsi, la bête doit avoir plus de 2 ans pour les bovins et au moins six moins (plus d’une année de préférence) pour les ovins. Elle ne doit être ni malade, ni vieille, ni maigre, ni borgne, ni aveugle, ni boiteuse, ni amputée totalement de sa queueet disposer de tous ses membres. Les bêtes n’ayant pas de corne ou de queue naturellement et les mâles “castrés” sont autorisés pour le sacrifice. Le bélier cornu, avec les extrémités des pattes noires, le ventre noir et les alentours des yeux noirs est particulièrement prisé par les musulmans de France.
13 – Qui doit effectuer le sacrifice ?
La tradition commande au chef de famille de tuer l’animal lui-même, si la loi du pays l’autorise. Sinon, il peut mandater une autre personne pour le faire à sa place.
14 – Doit-il assister à la mise à mort de l’animal?
Sa présence n’est pas obligatoire mais recommandée. En revanche, le mandataire doit, dans la mesure du possible, citer le nom du propriétaire de la bête au moment de la mise à mort de la bête.
15 – Que fait-on de la viande ?
Placée sous le signe du partage et de la solidarité, la fête de l’Aïd el-Kébir est l’occasion pour les musulmans de se retrouver et de resserrer les liens entre les membres de la communauté et notamment de ceux qui vivent dans le besoin (pauvres, nécessiteux, orphelins). Lors de cette fête, la tradition veut que le 1er tiers de la viande soit donné aux pauvres et aux nécessiteux, le 2ème tiers aux amis et aux voisins (musulmans ou pas) et le 3ème tiers à la famille.
16 – Qu’en est-il du bien-être de l’animal ?
Il faut minimiser les souffrances de l’animal qui doit être traité avec douceur, sans brutalité ou violence. Le sacrificateur doit vider la bête de son sang, sans l’assommer et en utilisant un couteau tranchant et bien aiguisé, qu’il ne faut sortir de son fourreau qu’au dernier moment pour éviter de l’exposer devant la bête.
17 – Est-il possible de commander la bête chez un boucher ?
Oui, beaucoup de musulmans le font. Il faut juste s’assurer auprès du boucher que la bête a bien été tuée après la prière de l’Aïd.
18 – Est-il possible de commander la bête dans une grande surface ?
Oui, à condition que l’abattage soit fait après la prière de l’Aïd, ce qui n’est pas forcément le cas pour les grandes surfaces.
19 – Est -il possible de remplacer l’abattage d’une bête par un don ?
Beaucoup de savants musulmans admettent le principe de la substitution, c’est-à-dire le fait de remplacer l’abattage d’un animal par un don. Ainsi, des organisations caritatives musulmanes proposent aux fidèles de recueillir un don en lieu et place du sacrifice d’un ovin pour le diriger vers des familles nécessiteuses. Toutefois, beaucoup de citoyens français de confession musulmane restent attachés culturellement et cultuellement à la pratique et à la symbolique de ce rite.
Notes
[1]L’année lunaire comporte 354 ou 355 jours au lieu de 365 pour l’année solaire. Les mois lunaires sont au nombre de 12 et comptent 29 ou 30 jours. Le vendredi est le jour le plus important de la semaine. Les croyants se rassemblent à la mosquée pour prier ensemble.
[2]Environs 3 millions de musulmans venant du monde entier accomplissent chaque année le pèlerinage.
[3]Le mont Arafat, appelé aussi la “montagne de la miséricorde” est une colline à l’est de la Mecque. A la fin des rites du pèlerinage, plus précisément neuvième jour du dernier mois de l’année lunaire, les croyants se rassemble tous à cet endroit. C’est un jour symbolique pour honorer le jugement dernier. C’est aussi la journée pour demander pardon à Dieu. La station au mont d’Arafat est un des piliers du pèlerinage.
[4]Chaque année, les responsables musulmans de France attendent l’annonce du 1er jour mois de Dhou al Hijja (12ème mois lunaire) par la cour suprême saoudienne qui s’appuie sur la vision oculaire. Le CFCM et les mosquées annoncent alors aux fidèles la date du 1er jour de la fête du sacrifice qui correspond au 10ème jour de ce mois lunaire.
Par : Ezzedine Gaci