L'armée malienne torture et tue, parfois

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L'ampleur du phénomène reste, difficilement, quantifiable: s'agit-il d'une stratégie de contre-insurrection, dans une région plus favorable aux islamistes qu'ailleurs, au Mali, ou de dérapages d'esprits échauffés?

Dans le Nord du Mali, l'armée malienne a, régulièrement, recours à la torture et au meurtre contre les suspects de soutien aux groupes islamistes armés, au temps de leur domination, ont constaté des médecins et militaires maliens, des soldats français et un journaliste de l'AFP. L'ampleur du phénomène reste, difficilement, quantifiable: s'agit-il d'une stratégie de contre-insurrection, dans une région plus favorable aux islamistes qu'ailleurs, au Mali, ou de dérapages d'esprits échauffés? Le colonel Saliou Maïga dirige la gendarmerie de Gao. Il a recensé plusieurs cas de torture et penche pour la deuxième hypothèse: «les soldats, s'ils ne sont pas contrôlés par leurs chefs, peuvent faire n'importe quoi». Certains de ces militaires, souvent, mal encadrés, sont portés sur l'alcool, voire, la drogue. Et si les islamistes ont commis de nombreuses exactions (amputations, lapidations...), ces soldats semblent, également, avoir peu de respect, pour la vie humaine. Plusieurs ont ainsi tiré sur des personnes désarmées passant à proximité, lors d'affrontements avec un petit groupe de jihadistes, le 10 février, dans le centre de Gao. Des militaires maliens et français estiment que les victimes civiles, ce jour-là, (au moins, trois morts et 15 blessés) étaient, «essentiellement», dues à l'armée malienne. Les accusations d'exactions contre cette dernière se multiplient, depuis le début de l'opération française "Serval", le 11 janvier, dans la presse, de la part d'ONG ("Human Rights Watch", "Amnesty International", Fédération internationale des droits de l'Homme) et des communautés arabes et touareg. Ces deux ethnies sont surnommées «peaux blanches», par la population noire majoritaire, qui les accuse, souvent, d'être «tous des terroristes» et mène aussi, par endroits, des représailles ethniques sans discrimination. Les ONG parlent de «graves abus», dont des meurtres, dans et autour de la ville de Niono (ouest), d' «une série d'exécutions sommaires», près de Mopti et Sévaré (centre), où sont, également, rapportées des «violences sexuelles contre des femmes», et dans d'autres localités, dans «les zones d'affrontements». Dans l'une des villes du Nord (à leur demande, l'AFP ne nomme, ni ne localise les victimes), un homme affirme qu'après l'avoir tabassé et brûlé à la cigarette, des soldats maliens lui ont versé de l'acide dans les narines. «C'est, peut-être, parce que je suis Tamashek (Touareg), je ne vois pas d'autre raison», juge-t-il. Ailleurs, une «peau blanche» gît sur son lit de douleur, des os brisés, plusieurs balles dans le corps. Là encore, l'armée a sévi, dit le jeune blessé à l'AFP. Son médecin précise qu'il a été violé.

A Tombouctou, des journalistes de l'agence américaine Associated Press (AP) ont également affirmé avoir découvert deux Arabes enterrés dans le sable, près de la ville. La famille de l'un d'eux a expliqué que la victime avait été arrêtée, par les forces maliennes, deux semaines auparavant. Plus de nouvelles ensuite, jusqu'à la découverte de son cadavre. Depuis, des soldats maliens sont venus plusieurs fois voir les journalistes d'AP, selon une source militaire française et un journaliste, sur place. Pas de menaces physiques, selon ces sources, mais une insistante pression psychologique. L'agence n'a pas souhaité s'exprimer. A Gao et Tombouctou, des soldats français ayant vu agir leurs homologues maliens confient leur écoeurement. «Ils traitent leurs prisonniers, comme des chiens», dit l'un. Un autre explique: «La hiérarchie (de l'armée française) a semblé inquiète, mais, ensuite, ça se joue, à Paris».

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