L’influence culturelle des Iraniens après l’avènement de l’Islam et la montée en puissance des Turcs au sein de l’empire islamique
Nous avons déjà parlé du territoire géographique et de l’étendue de l’influence culturelle de l’Iran qui allait jusqu’à la moitié du monde avant l’avènement de l’Islam. Lorsque les Sassanides furent renversés et les Iraniens se convertirent à l’Islam, le champ d’influence de l’Iran s’étendit davantage si bien que les Iraniens, ayant occupé des postes-clés au sein des gouvernements Omeyyades et Abbassides, élargirent leur champ d’influence vers les régions les plus lointaines du monde. L’Europe du Sud et l’Andalousie, en Espagne, comptaient désormais parmi les régions conquises par les musulmans à la fin du 1er siècle de l’hégire (VIIe siècle). Les Iraniens, forts de leur culture riche et dynamique, arrivèrent en Espagne en compagnie d’autres musulmans. Ils contribuèrent dans la sauvegarde des lois de l’Islam et la gestion administrative, religieuse et scientifique du territoire conquis tout comme les autres pays conquis par l’Islam. A l’époque, des centaines de religieux, de jurisconsultes, de commentateurs et de politiciens arrivèrent en Espagne à partir du Khorasan et d’autres villes iraniennes et ils restèrent dans les villes d’Andalousie. Les Iraniens faisaient preuve d’une présence influente en Andalousie jusqu’au 5e siècle de l’hégire (XIe siècle). Selon les ouvrages historiques, plus de 150 savants iraniens vivaient en Espagne à cette époque-là.
Les Iraniens du Khorasan, en qui les Khalifes abbassides avaient confiance, jouèrent un rôle important dans la gestion des affaires politiques et militaires d’Egypte, d’autres régions de l’Afrique du Nord, du Maroc et des îles de la Turquie. La culture iranienne apparut une fois de plus, après l’époque achéménide, dans le territoire égyptien. Après l’avènement de l’Islam, les Iraniens, appuyés par leur culture et leur civilisation riche, arrivèrent pour la première fois, dans les régions les plus lointaines du Sud-est asiatique dont la Malaisie et l’Indonésie. L’arrivée de la culture irano-islamique en Indonésie et en Malaisie est bien manifeste car les missionnaires islamiques, qui y étaient présents, étaient pour la plupart des Iraniens. En plus, les ouvrages qui furent traduits par les musulmans étaient pour la plupart des ouvrages iraniens en langue persane. Avec l’arrivée de l’Islam en Iran, le foyer culturel des Iraniens, qui se trouvait auparavant à l’ouest du plateau iranien se déplaça à l’est. Sous les Omeyyades, la plupart des hommes de culture et des élites vivaient dans le centre, l’ouest et le sud de l’Iran mais ils quittèrent ces régions, et immigrèrent vers le Khorasan et la Transoxiane. Ce flux d’immigration est à l’origine de la prospérité de ces régions tout au long de l’histoire de la civilisation irano-islamique.
La Transoxiane fut une région au peuplement iranien au début de l’époque islamique et elle constitue toujours l’un des berceaux de la civilisation iranienne. Mais au-delà du fleuve Djeyhoun, les ethnies belligérantes non-musulmanes mettaient en danger cette région prospère par leurs pillages et attaques. Aux premiers siècles islamiques, le Khorasan du Nord et la Transoxiane constituèrent les dernières limites frontalières du monde musulman dans l’extrême nord de l’Asie. Lorsque les Iraniens se convertirent à l'Islam, les habitants du Khorasan et de la Transoxiane furent chargés de défendre les frontières de ces régions face aux hordes envahissantes de l’époque. Aux premiers siècles islamiques, les musulmans sont entrés en conflit avec les ethnies turques sur les frontières de la Transoxiane. Les Turcs résistèrent d’abord mais ils se convertirent ensuite en Islam et furent progressivement admis aux cours des dirigeants musulmans.
Les esclaves turcs, qui se convertirent en Islam, furent courageux et forts. Les dirigeants musulmans découvrirent très vite leurs capacités de combativité et ils les recrutèrent. Chaque dirigeant musulman fit former, dans sa troupe, une force, composée d’esclaves turcs guerriers qui lui était fidèle. Ils les chargèrent surtout comme leurs garde-corps. Ces guerriers turcs firent preuve de leurs capacités militaires et de leur fidélité et occupèrent graduellement les postes les plus importants grâce au système ouvert de la hiérarchie de la société islamique.
La fidélité des esclaves turcs envers les dirigeants musulmans ne fit pas long feu, ils commencèrent à intervenir dans les affaires des gouvernements et à tenter de les renverser dès qu’ils occupaient les postes les plus hauts dans la hiérarchie militaire. On dirait que les califes abbassides comme Mo’tassem furent les premiers à recruter les esclaves turcs dans les troupes islamiques mais selon The Cambrige History of Iran, les princes iraniens et musulmans de la Transoxiane et de Sogdiane furent les premiers à recruter les Turcs en tant que soldats mercenaires et garde-frontières. Plus tard, les gouverneurs iraniens des Saffârides et des Samanides firent la même chose. Saboktakin, père du roi Mahmoud de Ghaznî, fut un valet de la cour samanide. Fort de capacités militaires, il devint le gouverneur du Khorasan et mit sur pied l'empire Ghaznévide. Les Ghaznévides arrivèrent à fonder un empire presque aussi vaste que les derniers empires dans l’étendue de la culture iranienne. Les rois ghaznévides furent les enfants des esclaves turcs mais ils se donnaient une origine iranienne. Beaucoup de savants et d’artistes iraniens accompagnaient les gouverneurs turcs dans leurs déplacements vers les quatre coins du monde et s’initièrent de près aux cultures des pays lointains. Abu Reyhan-e Birouni est un exemple manifeste de ces savants et son ouvrage Étude des idées de l'Inde est le fruit de ces déplacements.
Jusqu’à la fin de l’époque ghaznévide, les Turcs occupèrent les postes militaires et politiques d’une manière individuelle. Les Turcs, un par un, accédèrent à des postes supérieurs et ils devinrent des commandants et parfois des rois. Ils coupèrent pour la plupart leurs relations avec leurs famille et proches, acceptèrent la culture irano-islamique et s’initièrent à la langue persane et à la culture iranienne. A titre d’exemple, le roi Mahmoud de Ghaznî protégeait même les poètes et la littérature persane. Les rois turcs, qui ne profitaient pas du soutien de leur tribu, agissaient comme les rois iraniens en toute liberté. Certains, comme le roi Mahmoud de Ghaznî, se donnèrent même une origine iranienne. L’agression collective de tribus turques vers le plateau iranien commença par l’incursion d’une famille issue de la tribu turcique oghouz. A cette époque-là, la plupart des ethnies turques de la Transoxiane et du Khorasan du Nord s’étaient converties en Islam, alors les troupes musulmanes n’eurent plus aucune raison pour attaquer ces régions. D’où la désinstallation graduelle des casernes frontalières en Transoxiane qui a rendu le terrain propice à l’arrivée des Turcs musulmans dans le plateau iranien. Les tribus turciques seldjoukides, déjà convertis à l’Islam, qui souffraient de mauvaises conditions de vie, demandèrent aux gouverneurs ghaznévides de l’Iran de leur permettre d’utiliser les pâturages en contrepartie de la protection des frontières du nord face aux agresseurs. L’affaiblissement des Ghaznévides en Transoxiane et le transfert de leur capitale à Ghazni, à la frontière de l’Inde, donnèrent une chance aux Turciques seldjoukides de monter en puissance. Ces derniers resserrèrent l’étau autour des régions prospères et civilisées de la Transoxiane et de Khârezm et ne cessèrent de menacer les zones d’habitation par les attaques et les pillages.
Avant l’installation des tribus turciques notamment des seldjoukides, la Transoxiane et le Khârezm furent marqués par la population et la culture iraniennes et les langues Khârezmi et sogdienne s’y parlaient aussi. La langue Khârezmi se parlait et s’écrivait dans cette région. Les Turciques seldjoukides lancèrent des attaques en série contre cette région et en prirent le contrôle des villes. Ils vainquirent le roi Mahmud Ghazni et prirent le contrôle du plateau iranien.
Patrimoine immatériel d'Iran, gloire universelle
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Reportage