Trois récents articles effacent de l’histoire les crimes majeurs commis par Israël.
Dans un article du 13 décembre 2012 intitulé “le Hamas gagne du Prestige à Gaza, mais l’Argent est un vrai Problème ,” Steven Erlanger explore les raisons de la pauvreté de plus en plus écrasante à Gaza. Pas une seule fois dans ce texte de 1300 mots Erlanger ne fait même mention du blocus israélien de Gaza, ni des bombardements de 2008 et 2012 comme facteurs de cette pauvreté (et surtout pas comme sa cause principale).
Au contraire, Erlanger présente une longue liste de développements régionaux (l’affaiblissement du régime Assad en Syrie, les sanctions contre l’Iran) et il insiste sur des décisions prises par le Hamas (de nouvelles taxes et des frais nouveaux), qui laisseraient les Palestiniens de Gaza non seulement dans une pauvreté accrue, mais aussi plus mécontents que jamais du Hamas. “Les Gazaouis reconnaissent qu’il y a davantage d’ordre ici,” explique Erlanger , “plus de constructions et moins de détritus. Mais beaucoup de gens en ont assez du fardeau que représente le financement du Hamas et, implicitement, de sa branche armée.”
Pas de blocus
Dans la limite même où le récent massacre israélien est tout simplement pris en compte, ce sont les roquettes du Hamas qui sont encore une fois accusées du malheur de Gaza. Comme pour étayer l’argument, un boucher de 43ans dit à Erlanger, “la situation se délite régulièrement à Gaza.” Un autre habitant de Gaza ajoute “c’est une vie de dépression et de privations que nous menons.”
Erlanger n’inclut pas le mot “blocus” dans son analyse, il le fait seulement dans une liste de problèmes que subissent actuellement les Palestiniens de Gaza : “pauvreté, mauvaise gestion, blocus, chômage, liberté de mouvement restreinte,” en citant Mkhaimar Abusada. Et le blocus, parmi toutes ces autres conditions, est implicitement attribué au Hamas, pas à Israël : “s’il n’arrive pas à résoudre ces problèmes,” conclut Abusada, “ le Hamas se retrouvera dans la même position qu’avant la guerre.” Alors qu’ Abusada, spécialiste en sciences politiques à l’Université Al-Aqsa, connait très certainement l’origine de cette situation, l’endroit où Erlanger place sa citation laisse penser que même Abusada fait porter la responsabilité sur le Hamas.
Quoi qu’il en soit, Erlanger n’offre aucune idée de ce que peut avoir de totalement dévastateur un blocus aérien, terrestre et maritime (sans même parler des deux dernières attaques militaires) sur ce territoire densément peuplé.
Un lecteur non informé pourrait aisément conclure que ce blocus est quelque chose dont le Hamas est responsable, et non une forme impérialiste de punition collective imposée aux Palestiniens par Israël. Et non quelque chose qui est directement responsable de la pauvreté de Gaza et de la “liberté de mouvement restreinte .”
C’est donc le Hamas qui, selon le New York Times, est responsable des problèmes de Gaza. Israël n’y est pour rien.
Pas de Nakba
Un article du Times sur les réfugiés palestiniens en Syrie publié trois jour après l’histoire d’ Erlanger sur
Selon le New York Times, il n’y a pas de blocus de Gaza, pas d’ occupation de la Cisjordanie et la Nakba (le nettoyage ethnique de la Palestine en 1948) n’a jamais existé.
Gaza, rend obscures les raisons qui ont fait que les Palestiniens sont devenus des réfugiés (“A Syrian airstrike kills Palestinian refugees and costs Assad support,” 16 December 2012).
En tout juste ۸ mots, le Times absout Israël de toute responsabilité dans le nettoyage ethnique de centaines de milliers de Palestiniens afin de faire de la place pour un Etat juif.
Relatant la récente attaque par le régime syrien du camp de Yarmouk à Damas, où vivent des milliers de réfugiés palestiniens, le Times explique que les Palestiniens qui s’y trouvent sont des “réfugiés du conflit entre Israël et leurs ascendants.” La Nakba, le péché originel du sionisme et de l’Etat d’Israël, est ainsi délayée dans l’ obscurité. Elle est transformée en quelque chose qu’elle n’est pas, où le déplacement forcé de tout un groupe de gens par un autre devient un conflit entre deux parties a priori égales, qui a évidemment fait fuir un tas de Palestiniens.
Le journal, bien entendu, n’en vient pas à expliquer que, alors que la Résolution 194 des Nations unies accorde spécifiquement aux Palestiniens de Syrie (comme à ceux du Liban, de Jordanie et d’ailleurs) le droit de retourner chez eux dans ce qui est maintenant Israël, le gouvernement israélien a toujours, parfois avec violence, nié ce droit.
Pas d’ occupation
Un article publié le jour suivant, sur ce qu’on appelle la zone E1 à l’est de Jérusalem en Cisjordanie occupée, ne mentionne pas que cette zone et le territoire plus vaste dont elle fait partie sont, pour le droit international, un territoire palestinien actuellement sous occupation israélienne (Steven Erlanger, “West Bank land, empty but full of meaning,” 17 December).
Reprenant les récentes déclaration israéliennes sur la construction de colonies dans la zone E۱, Erlanger reproduit le vieux mythe sioniste dans le texte : cette terre est “vide” et deux parties se la disputent aujourd’hui. “E۱ [est] une portion de la Cisjordanie qui est vide pour la plus grande partie,” écrit Erlanger. Et la “ bataille ” pour E۱ “parle de différences apparemment insurmontables, d’ hostilité et de méfiance entre Israéliens et Palestiniens,” selon Erlanger.
Ainsi, la Cisjordanie palestinienne occupée, avec toutes les colonies illégales, les routes réservées aux juifs, les points de contrôle israéliens, les incursions militaires israéliennes et les démolitions par Israël des maisons palestiniennes, est réduite à un territoire que deux groupes différents revendiquent avec la même légitimité. C’est quand Erlanger écrit vers la fin de son article que EI est “en grande partie terre d’état” qu’il s’approche un tant soit peu d’une mention de l’occupation.
Mais ceci, comme le “blocus” de Gaza, sans qu’il l’identifie ou l’explique, est beaucoup trop vague pour qu’un lecteur non averti comprenne quel “Etat” contrôle cette terre, dans quelles conditions et au détriment des droits, de la vie et de la souveraineté de qui.
Alors, voici le tableau : pas de blocus, pas de Nakba, et pas d’ occupation. Un reportage comme ceux-ci est au mieux illusoire et au pire délibérément trompeur. Dans tous les cas, le New York Times sert les intérêts d’Israël en maintenant le public américain dans l’ignorance quant à la véritable nature de l’occupation israélienne.
Il est facile de comprendre pourquoi tant d’Américains trouvent la situation si confuse en apparence, quand ceux qui la rapportent sont eux-mêmes emplis de confusion sur les réalités fondamentales en termes d’histoire, de géographie et de politique.