« L’émir du Qatar est obsédé par la Syrie et considère la bataille en cours comme étant une bataille personnelle. Hamad est certain qu’il paiera le prix si Assad triomphe, pour cette raison il investit tous ses efforts pour renverser le président syrien ».Telle est la conclusion d’un livre français nouvellement paru et rédigé par les deux journalistes Christian Chesnot et Georges Malbrunot.Sous le titre « Qatar : les secrets du coffre-fort », les deux journalistes rapportent les propos de certains politiciens et diplomates occidentaux et arabes, selon lesquels « l’équilibre interne à Doha sera ébranlé si la crise syrienne se prolonge encore, parce qu’un conflit intérieur oppose le Premier ministre Hamad ben Jassem ben Jabr al Thani au prince héritier Tamim qui adopte une approche différente sur le dossier syrien ».Par ailleurs, un diplomate français a déploré devant les deux écrivains que « l’autorité au Qatar ne planifie pas à long terme mais travaille seulement à court terme… c’est ici où réside son point faible ».
Selon certains extraits de ce livre, le Qatar a décidé en été 2012 d’armer l’opposition syrienne qui combat sur le terrain.« Des unités de forces spéciales qataries se sont déployées à la frontière turque et jordanienne mais leurs tentatives répétées de s’infiltrer en Syrie n’ont pas réussi. Toutefois la situation en Syrie a changé depuis septembre dernier. Les responsables des Nations Unies en Syrie ont révélé que des forces spéciales qataries sont arrivées à l’intérieur de la Syrie, c’est ce qu’un membre de la famille royale qatarie confirme ».« En été dernier, les qataris sont intervenus avec un soutien saoudien dans la guerre en Syrie dont la chambre d’opération était basée à Adana en Turquie. Ceci a permis aux Turcs de superviser l’afflux d’armes légères, notamment les kalachnikovs et des obus anti-char. Les rebelles ont commencé à acheter ces armes du marché noir grâce à l’argent des envoyés saoudiens, libanais et qataris ».
Différend saoudo-qatari
Spécialisés dans les affaires arabes, Malbrunot et Chesnot indiquent que « depuis aout 2012, les différends ont commencé à se faire voir entre les qataris et les saoudiens. Les musulmans soutenus par le Qatar et la Turquie ont voulu superviser les réseaux de transfert d’armement aux rebelles afin de renforcer leur contrôle sur le terrain.Les Saoudiens se sont irrités, et les combattants sur le terrain se sont divisés en deux parties : les frères musulmans soutenus par le Qatar d’une part, et les salafistes par l’Arabie Saoudite de l’autre…Les Qataris ont agi en Syrie à la base de leur expérience en Libye : «Quand un commandant d'une brigade armée refuse d’obéir à leurs ordres, les Qataris paient une grosse somme d’argent à son assistant qui fait défection et forme un nouveau groupe, ce qui a provoqué la dislocation des rebelles …« En automne dernier, le président français François Hollande a rencontré le premier ministre qatari. Hollande a rassuré son hôte de la poursuite des opérations secrètes conjointes entre les forces françaises et qataries pour soutenir l’opposition syrienne ».
Le différend d’Ibrahimi avec le Qatar
Citant Qays elAzzaoui, ambassadeur de l’Irak à la ligue arabe, les deux journalistes français rapportent que la Ligue arabe est dirigée par le Qatar. Selon lui, c’est Doha qui a fait pression sur les ambassadeurs du Yémen, de l’Egypte, du Soudan et de la Tunisie pour voter pour l’expulsion de la Syrie de la ligue arabe.Dans ce livre on dévoile l’implication du Qatar dans le renversement de Mouammar Kadhafi et dans l’acheminement d’armes via le Soudan.Les deux auteurs s’attardent sur le pétrole et l’argent qataris ainsi que sur leurs relations diplomatiques et l’achat de clubs de sport, mais tout ceci n’équivaut pas aux investissements émiratis en France, selon eux.Georges Malbrunot et Christian Chesnot ont travaillé pendant de longues années dans le monde arabe et ont été enlevés en Irak. Malbrunot s’est rendu en Syrie ces deux dernières années. Il fut parmi les premiers journalistes à dévoiler l’implication de miliciens étrangers et des djihadistes non syriens sur le terrain, et à dénoncer l’entrainement occidental des groupes armés syriens.