Depuis quelques heures déjà, plus exactement depuis que le MAE iranien a quitté le Liban pour la Syrie, l'enjeu pour l'axe US/Israël qui a lamentablement perdu la bataille des mers face au Hezbollah, dès lors qu'il s'est gardé de s'en prendre aux "pétroliers iraniens" transitant du pétrole pour le Liban puisque Nasrallah l'avait bien mis en garde contre toute erreur de calcule, n'est plus l'arsenal balistique de la Résistance,
ni ses missiles tactique même si un analyste et historien comme Yossi Halvey qui vient de publier un article où il reconnait que l'ère des guerres israélienne en territoire ennemis est bel et bien révolu et que la prochaine guerre se déroulera en plein d'Israël, veuille faire croire le contraire. Certes Halevy a raison quand il évoque "le conflit qui commencera à Gush Dan à Eilat pour s'étendre ensuite au reste d'Israël" et ce, "non seulement par le biais de 250 000 missiles qui seront quotidiennement tirés à raison de 3000 unités pour jour contre les villes, les villages les aéroports, les ports, les systèmes de contrôle à distance, des bases de l'armée"," un conflit total qui nous balancera à la figure toutes ces ruines que nous avons causés à l'Irak, à la Syrie, au Liban, à la Libye et au Yémen", mais cette analyse a désormais l'air totalement décalée. Pourquoi?
Vendredi à Beyrouth, l'Iran, à titre d'allié du Liban au sein de l'axe de la Résistance a proposé son assistance au secteur d’électricité au Liban : Amir Abdollahian est même allé jusqu'à faire un pari en soulignant qu'il ne fallait que "huit mois pour que les ingénieurs iraniens construisent deux centrales électriques propres à alimenter la totalité du Liban, deux centrales, dont l'une érigée dans le sud du Liban se connecterait aux lignes de haute tension que la Jordanie d'Abdellah II dit vouloir charger à l'intention du Liban.
Evidemment, cela fait une grosse différence car si le roi Abdellah II de Jordanie qui a appelé la semaine dernière au téléphone et au bout de dix ans de rupture le président Assad pour lui exprimer son respect et sa volonté à déclencher un nouveau départ dans les liens stratégiques de part et d'autre maintenant que Deraa est pacifié, ce respect et cette volonté de reprise ne l'empêcheront guère à s'opposer à ce que les F-16 israéliens frappent la Syrie comme ils viennent de le faire cette nuit après un répit de plus d'un mois. Ainsi, une électricité en partance de la Jordanie, vers le Liban et qui passerait par le territoire syrien est bien, mais sa sérénité dépendrait du bon vouloir d’Israël à moins que la Syrie devienne plus offensive que défensive, c'est à dire qu'elle dissuade balistiquement Israël. Ceci renvoie à une question bien plus épineuse concernant le Liban à savoir les capacités d'un Etat à s'imposer.
Vendredi à Beyrouth, Ami Abdollahiyan est allié un peu dans ce sens quand il a proposé de remettre sur les rails le secteur de l'électricité. Juste après son départ pour Damas , c'est à dire ce samedi, deux principales centrales électriques libanaise ont cessé de fonctionner puisque le fiole leur manque; si certains y ont vu un écho aux propos du porte parole du département d'Etat Ned Price qui jurait ses bons dieux vendredi pour convaincre les Libanais que " le pétrole iranien n'est pas une solution" et que " le Hezbollah fait là un coup de pub", d'autres ont jugé cette coupure générale d'"électricité comme étant un déclic pour faire rallier davantage de Libanais à cette ligne "souverainiste" que suit assidûment et depuis près de 3 ans le Hezbollah, soit depuis qu'il participe directement à la gestion de l'Etat. Et là prend tout son sens, cette seconde partie de la proposition du chef de la Diplomatie iranienne Amir Abdollahian :
"l'Iran est prêt à reconstruire le port de Beyrouth". Pour la partie américaine et surtout israélienne, cette offre veut dire beaucoup de chose : elle signifie que les choses sont allés si loin avec le Hezbollah que ce dernier peut protéger une présence permanente des sociétés de reconstruction iranienne à Beyrouth, sous le nez et la barde d'un axe US/Israël qui le 4 août 2020 a provoqué le débâcle du port, entre autre pour l'éliminer totalement de l'équation énergétique et transitaire en Méditerranée, où la Chine cherche insatiablement où poser les jalons de sa route de la soie. Cela veut dire que ce corridor maritime Iran-Syrie-Liban prend peu à peu corps et qu'il s'établisse dans la durée.
The Guardien fait un constat cuisant : en imposant au Liban le blocus qui soit, l’Occident a servi la cause du Hezbollah car il a été la seule partie au Liban à prouver sa capacité de gestion étatique, en temps de crise, ce que la mémoire collective libanaise n'oubliera jamais. Les USA espéraient voir les Libanais se rendre aux bureaux de vote, dans le cadre des législatives, alors qu’ils sont privés de courants d’eau et d’électricité, qu’ils souffrent des problèmes économiques et que leurs hôpitaux et écoles sont fermés faute de carburant et voter contre la Résistance mais les pétroliers iraniens sont arrivés pour régler la crise d’hydrocarbure et voici qu’une explosion sociale qui risquait de se produire, a perdu sa raison d’être.
L’importation du carburant iranien a brisé le monopole des petites sociétés libanaises qui étaient financées par des hommes d’État liés à l'Occident et a ouvert droit à une contribution du Hezbollah dans les domaines d’agriculture, d’industrie et de tourisme en fournissant du carburant à des usines, des hôtels, etc. Cela s'appelle l'étatisation d'un pays qui fonctionnait jusqu'ici suivant un régime clanique voulu par l'Occident. Puisque les Libanais sont convaincus que c’est le Hezbollah et ses alliés qui les ont aidés à sortir de la crise, ce serait difficile de les dissocier de cette idée, une idée qui pourrait aller trop loin, faire émerger l'Iran puis la Chine voire la Russie sur le rivage de Beyrouth.