تقي زاده

تقي زاده

Si le président français venait à se rendre en Iran pour tenter de maintenir le pays dans l’accord nucléaire, le partage de rôle pourrait alors changer. La France pourra-t-elle réussir la technique du bon flic ? Les lignes qui suivent résument un article paru ce lundi 1erjuillet par le site Mashregh News à ce sujet.

En réaction aux manquements des Européens à leurs engagements pris dans le cadre du Plan global d’action conjoint (PGAC, accord sur le nucléaire iranien), l’Iran a opté depuis le 8 mai pour deux pas importants, couvrant chacun une période de deux mois. Dans le premier pas, l’Iran a annoncé qu’il n’accepterait plus les restrictions au sujet du stockage d’eau lourde et d’uranium enrichi, et qu’il se désengageait de l’obligation de ne pas en vendre aux marchés mondiaux. Et dans le second pas, l’Iran a annoncé de plus importantes décisions, dont l’augmentation du niveau d’enrichissement de l’uranium jusqu’à un plafond supérieur à 3,67 %. Il a également annoncé sa décision de revoir la reconfiguration du réacteur d’Arak.

Depuis, les choses ont pris un rythme accéléré. Le camp occidental a élaboré des scénarios les uns plus ambigus que les autres, comprenant à la fois des menaces et des appels au dialogue et à l’adhésion au GAFI, Groupe d'action financière ou FATF selon son sigle anglais. Des intermédiaires, Ben Alaoui et Shinzo Abe ont pris l’avion pour Téhéran, alors que les États-Unis ont pendant ce temps annoncé l’envoi de quelques dizaines de milliers de nouveaux effectifs dans la région, avant que leur secrétaire d’État Mike Pompeo ne vienne annoncer que l’option militaire n’était pas sur la table. L’appel au dialogue sans condition était suivi de l’annonce des préconditions, tandis que les Européens, eux, n’ont pas manqué d’avancer leurs revendications trop exigeantes. Ils disent avoir démarré l’Instex (Instrument d'appui aux échanges commerciaux Iran-Europe) qu’ils maintiennent cependant dans son état le moins avancé.

Des observateurs et analystes politiques disent que le président français, Emmanuel Macron, fera un déplacement en Iran pendant les jours à venir. Certains disent que ce troisième « médiateur » aurait demandé l’autorisation pour mener cette mission à la personne même du président US, Donald Trump, qui a proposé un deal façon américaine au chef de l’État français : « en essayant de persuader l’Iran à donner de nouvelles concessions sur les dossiers régionaux et son programme de missiles, Macron pourrait espérer que les États-Unis reviendront au Traité de Paris sur le climat et réduiront leur appui aux adversaires électoraux du parti au pouvoir en France » !

Mais quel est l’objectif de cette visite et quelle est la vraie position des États-Unis à ce sujet ?

Il est évident que les États-Unis sont parvenus à une impasse stratégique dans leur approche envers l’Iran. Ils ne sont plus capables d’étendre leurs pressions ni de trouver des solutions à court terme. L’accord a été anéanti, les sanctions sont à leur niveau maximal, la menace militaire est devenue inefficace, voire insignifiante avec la destruction du drone d’espionnage américain. Face à l’Iran, les Américains ne savent plus sur quel pied danser ; et nous avons vu que leur réaction à la destruction du Global Hawk était tardive et quelque peu ridicule. Et lors du Sommet du G-20 d’Osaka aussi, les prises de positions du président américain, envers des pays comme la Chine et la Turquie, trahissaient ce même défaut : manque d’expérience politique du M. le président-businessman.

En tout cas, si la visite d’Emmanuel Macron à Téhéran a lieu, l’on pourrait dire que sa mission serait la version actualisée de celle de Shinzo Abe.

Mais sera-t-il porteur d’une nouvelle proposition ?

Deux visions existent. Soit le président français viendra en Iran les mains vides, tout simplement comme un messager et agent de Donald Trump qui espère pouvoir réussir un show médiatique en évoquant davantage de pressions sur Téhéran. Dans ce cas-là, cette visite n’aurait aucun autre objectif que de perturber le fonctionnement des milieux décisionnels iraniens, sans donner de concessions. Cela montrerait qu’ils n’ont pas encore une idée correcte de la situation en Iran ; ils souhaiteraient juste empêcher l’Iran de quitter le PGAC, par des paroles et campagnes médiatiques. Cette hypothèse devrait naturellement décevoir les analystes les plus optimistes, quant aux chances de M. Macron de réussir sa mission.

lundi, 01 juillet 2019 23:21

Attaque contre Damas : Moscou s’enrage

La Russie veut établir les faits sur les toutes récentes attaques aux missiles contre Damas, attaques effectuées par des avions israéliens ayant violé l’espace aérien du sud libanais. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a affirmé que Moscou examinait les attaques au missile israéliennes de ce lundi matin contre Damas, capitale de la Syrie.

« Nous évaluons cette question pour établir les faits sur ces attaques. Nous ne savons pas ce qui y est arrivé et nous voulons avoir une idée claire de ce qui s’est produit », a affirmé Sergueï Lavrov, cité par l’agence TASS.

Ce lundi 1er juillet au matin, la télévision d’État syrienne a annoncé que la DCA syrienne avait repoussé des attaques contre le sud de Damas, Homs et d’autres zones en Syrie. D’après la version publiée par l’agence officielle SANA, ces missiles ont été tirés par des avions israéliens depuis l’espace aérien du Liban.

« Les Européens se sont engagés à défendre nos intérêts : la vente de pétrole, le transport, la restitution des avoirs de l’Iran et des revenus provenant de la vente de pétrole. Ils ont évoqué le sujet lors de nos réunions, de la réunion du G4+1 et de celle des Nations unies. Mais ils n’ont toujours pas rempli leurs obligations », a déclaré le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif.

En marge des obsèques de Safari Natanzi, député de la région de Natanz au Parlement iranien, M. Zarif s’est exprimé sur le message de l'Iran aux Européens après le 7 juillet, date à laquelle expire le délai de 60 jours donné par le Conseil suprême de la sécurité nationale : « Nous avons déjà annoncé que les mesures européennes ne suffisaient pas et nous allons donc entamer la deuxième étape de l’affranchissement de nos obligations. La première étape est en cours, à la fois pour les réserves d’uranium et d’eau lourde. La prochaine étape a été annoncée et sera mise en œuvre. »

« La lettre du président de la République islamique indique explicitement que s’ils [les Européens] respectaient leurs engagements, nous reviendrions sur nos décisions. Sinon, conformément à l'article 36 du PGAC, nous mettrons en œuvre nos mesures », a-t-il fait savoir.

En réponse à une question sur le mécanisme Instex – une structure juridique censée éviter les foudres de Washington aux entreprises commerçant avec l'Iran – M. Zarif a déclaré : « Instex est un geste préliminaire pour le respect des engagements de l'Europe qui figurent dans les articles 1 à 3 de l'annexe 2 de l’accord sur le nucléaire. Après le retrait des États-Unis de l’accord et la mise en œuvre de l'article 36 par l'Iran, les Européens ont fourni 11 engagements dont Instex ne fait pas partie, mais constitue un prélude. Non seulement les Européens n’ont pas rempli leurs engagements, mais 14 mois se sont écoulés et nous n’avons pas d’informations suffisantes sur Instex ».

« Les Européens se sont engagés à défendre nos intérêts : la vente de pétrole, le transport, la restitution des avoirs de l’Iran et des revenus provenant de la vente de pétrole. Ils ont évoqué le sujet lors de nos réunions, de la réunion du G4+1 et de celle des Nations unies. Mais ils n’ont toujours pas rempli leurs obligations », a-t-il indiqué.

Au sujet des réserves d’uranium enrichi, il a déclaré : « Autant que je sache, conformément à son programme, l’Iran a dépassé le seuil des 300 kg d’uranium enrichi. Cette décision a été annoncée au préalable et nous l’avions abordée clairement. Cela fait partie de nos droits dans le cadre de l’accord sur le nucléaire. »

Interrogé sur un éventuel boycott d’Instex par les États-Unis, le chef de la diplomatie iranienne a précisé que les Européens en étaient les seuls responsables et devaient répondre à la question.

La façon dont le leader nord-coréen traite Donald Trump devrait servir de leçon aux pays arabes du golfe Persique surtout l’Arabie saoudite, écrit le journal Ral ai-Youm.

À la demande du président américain, Donald Trump et Kim Jong-un se sont rencontrés le dimanche 30 juin dans la zone démilitarisée séparant les deux Corées. Le nom de Donald Trump est donc enregistré dans les annales de l’histoire en tant que le premier président des États-Unis à avoir mis les pieds sur le territoire nord-coréen, en franchissant la ligne frontalière qui relie la Corée du Sud à son voisin du Nord. Cette rencontre a eu lieu alors que les deux précédentes rencontres des dirigeants américain et nord-coréen n’ont donné aucun résultat tangible en raison des revendications maximalistes de Donald Trump.

D’après le journal Rai al-Youm, « le fait que le président US a proposé que cette rencontre ait lieu montre que Donald Trump ne respecte que ceux qui l’ont humilié et qui n’ont aucune peur de ses menaces de guerre."

« Ce ne serait pas pour obtenir un désarmement nucléaire de la Corée du Nord que le nom de Donald Trump sera marqué dans l’histoire ; c’est juste parce qu’il est le premier président des États-Unis à avoir mis le pied sur le sol nord-coréen. Il paraît que le leader nord-coréen maîtrise l’art de profiter des points faibles de Donald Trump. Kim sait comment faire : organiser deux sommets avec le président US, sans donner la moindre concession au sujet des revendications de Washington qui exige de Pyongyang qu’il accepte le désarmement nucléaire et mette fin à ses essais de missiles balistiques. »

« Sans abandonner sa vision stratégique reposant sur la dissuasion nucléaire, le leader nord-coréen sait bien choisir ses mots, lorsqu’il parle avec Donald Trump qui est d’ailleurs réputé pour avoir une faible connaissance des relations internationales surtout la donne de l’Asie de l’Est. »

Lors d’un tête-à-tête, ce lundi 1er juillet à Bagdad, les dirigeants du mouvement de la Résistance irakienne, al-Nujaba et de l’Organisation Badr, respectivement Akram al-Kaabi et Hadi al-Ameri ont examiné les dernières évolutions qui traversent l’Irak et la région.

En allusion aux efforts simultanés visant à maîtriser les questions politiques et assurer la sécurité du pays, le cheikh Akram al-Kaabi a insisté sur l’éradication complète des cellules dormantes de Daech.

 

Nous poursuivons la publication du livre de Thierry Meyssan, « Sous nos yeux ». Dans cet épisode, il décrit la manière dont le président Jimmy Carter et son conseiller national de Sécurité, Zbigniew Brzezinski, utilisèrent les capacités terroristes des Frères musulmans contre les Soviétiques.

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Le conseiller de sécurité nationale, Zbigniew Brzezinski, a imaginé d’utiliser les Frères musulmans pour des opérations terroristes contre le gouvernement communiste afghan ; ce qui a provoqué l’intervention de l’URSS.

3— La Confrérie au service de la stratégie Carter/Brzezinki

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Sir James Macqueen Craig, spécialiste du Moyen-Orient, a convaincu le Royaume-Uni d’utiliser les Frères musulmans pour des opérations secrètes hors d’Égypte. C’est aussi lui qui a conçu le plan des « printemps arabes » sur le modèle de l’opération réalisée en 1915 par Lawrence d’Arabie.

En 1972-73, un responsable du Foreign Office — et probablement du MI6 —, James Craig, et l’ambassadeur britannique en Égypte, Sir Richard Beaumont, commencent un intense lobbying pour que leur pays et les États-Unis s’appuient sur les Frères musulmans non seulement en Égypte, mais dans tout le monde musulman contre les marxistes et les nationalistes. Sir Craig sera bientôt nommé ambassadeur de sa Majesté en Syrie, puis en Arabie, et trouvera une oreille attentive à la CIA. Il sera, beaucoup plus tard, le concepteur des «  Printemps arabes  ».

En 1977 aux États-Unis, Jimmy Carter est élu président. Il désigne Zbigniew Brzezinski comme conseiller national de sécurité. Ce dernier décide d’utiliser l’islamisme contre les Soviétiques. Il donne son feu vert aux Saoudiens pour augmenter leurs versements à la Ligue islamique mondiale, organise des changements de régime au Pakistan, en Iran et en Syrie, déstabilise l’Afghanistan, et fait de l’accès états-unien au pétrole du Moyen-Orient un objectif de sécurité nationale. Enfin, il confie des moyens militaires à la Confrérie.

Cette stratégie est clairement expliquée par Bernard Lewis lors de la réunion du Groupe de Bilderberg [1] que l’Otan organise en avril 1979 en Autriche. L’islamologue anglo-israélo-états-unien y assure que les Frères musulmans peuvent non seulement jouer un grand rôle face aux Soviétiques et provoquer des troubles internes en Asie centrale, mais aussi balkaniser le Moyen-Orient dans l’intérêt d’Israël.

Contrairement à une idée reçue, les Frères ne se sont pas contentés de suivre le plan Brzezinski, ils ont vu plus loin et obtenu l’assistance de Riyad et de Washington pour constituer d’autres branches de la Confrérie dans d’autres pays  ; branches qui prendront ultérieurement leur essor. À cette époque, le roi d’Arabie octroie une moyenne de 5 milliards de dollars annuels à la Ligue islamique mondiale qui étend ses activités dans 120 pays et finance des guerres. À titre indicatif, 5 milliards de dollars, c’était l’équivalent du budget militaire de la Corée du Nord. La Ligue obtient le statut consultatif auprès du Conseil économique et social de l’ONU et un statut d’observateur à l’Unicef.

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Le général Muhammad Zia-ul-Haq, premier chef d’État membre des Frères musulmans hors d’Égypte, permet aux combattants de la Confrérie de disposer d’une base arrière contre les communistes afghans.

Au Pakistan, le général Muhammad Zia-ul-Haq, chef d’état-major des armées formé à Fort Bragg aux États-Unis, renverse le Président Zulfikar Alî Bhutto et le fait pendre. Membre de la Jamaat-e-Islami, c’est-à-dire de la version locale des Frères musulmans, il islamise la société. La charia est progressivement établie — y compris la peine de mort pour blasphème — et un vaste réseau d’écoles islamiques est installé. C’est la première fois que la Confrérie est au pouvoir hors d’Égypte.

En Iran, Brzezinski convainc le Shah de partir et organise le retour de l’imam Rouhollah Khomeini, qui se définit comme un «  islamiste chiite  ». Dans sa jeunesse, Khomeini a rencontré Hasan el-Banna au Caire, en 1945, pour le persuader de ne pas alimenter de conflits sunnites/chiites. Par la suite, il a traduit deux livres de Sayyid Qutb. Les Frères et le Révolutionnaire iranien s’accordent sur des sujets sociétaux, mais pas du tout sur les questions politiques. Brzezinski réalise sa méprise le jour même de l’arrivée de l’ayatollah à Téhéran, car celui-ci va prier sur les tombes des martyrs du régime du Shah et appelle l’armée à se révolter contre l’impérialisme. Brzezinski commet une seconde erreur en envoyant la Delta Force secourir les espions états-uniens qui sont retenus dans leur ambassade à Téhéran. Même s’il parvient à masquer aux yeux des Occidentaux que ses diplomates n’étaient pas des otages mais bien des espions, il ridiculise ses militaires dans l’opération manquée «  Serre d’aigle  », et installe au Pentagone l’idée selon laquelle il faudra se donner les moyens pour vaincre les musulmans.

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Le milliardaire saoudien Oussama Ben Laden, héros de l’Occident contre les Soviets.

En Afghanistan, Brzezinski met sur pied l’«  Opération Cyclone  ». Entre 17 et 35 000 Frères musulmans, originaires d’une quarantaine de pays, vont se battre contre l’URSS venue défendre à sa demande la République démocratique d’Afghanistan du terrorisme des Frères [2]— il n’y a jamais eu d’«  invasion soviétique  » comme le prétend la propagande US. Ils ne seront jamais plus de 15 000 à la fois. Ces hommes viennent en renfort d’une coalition de combattants conservateurs et des Frères musulmans locaux, dont le Pachtoune Gulbuddin Hekmatyar et le Tadjik Ahmed Chah Massoud. Ils reçoivent leur armement pour l’essentiel d’Israël [3]— officiellement leur ennemi juré, mais désormais leur partenaire. L’ensemble de ces forces est commandé depuis le Pakistan par le général Muhammad Zia-ul-Haq et financé par les États-Unis et l’Arabie saoudite. C’est la première fois que la Confrérie est utilisée par les Anglo-Saxons pour livrer une guerre. Parmi les combattants présents se trouvent les futurs responsables des guerres du Caucase, de la Jemaah Islamiyah indonésienne, du groupe Abou Sayyaf aux Philippines, et bien sûr d’Al-Qaïda et de Daech. Aux États-Unis l’opération antisoviétique est soutenue par le Parti républicain et un groupuscule d’extrême gauche, les trotskistes de Social Democrats USA.

La stratégie Carter/Brzezinski représente un changement d’échelle [4]. L’Arabie saoudite, qui était jusqu’ici le financier des groupes islamistes, se voit chargée de gérer les fonds de la guerre contre les Soviétiques. Le directeur général du Renseignement saoudien, le prince Turki (fils du roi de l’époque, Fayçal), devient une personnalité incontournable de tous les sommets occidentaux du Renseignement.

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Le Palestinien Abdallah Azzam et le Saoudien Oussama Ben Laden ont été formés à Riyad par Mohammad Qutb, le frère de Sayyid Qutb. Ils ont successivement dirigé les combattants des Frères musulmans en Afghanistan.

Les problèmes entre Arabes et Afghans étant récurrents, le prince Turki envoie d’abord le Palestinien Abdallah Azzam, l’«  imam du jihad  », remettre de l’ordre entre les Frères et administrer le bureau local de la Ligue islamique mondiale, puis le milliardaire Oussama Ben Laden. Azzam et Ben Laden ont été formés ensemble en Arabie saoudite par le frère de Sayyid Qutb.

Toujours durant le mandat Carter, les Frères musulmans entreprennent une longue campagne de terreur en Syrie, incluant l’assassinat des cadets non sunnites à l’Académie militaire d’Alep par l’«  Avant-garde combattante  ». Ils disposent de camps d’entraînement en Jordanie où les Britanniques leur dispensent une formation militaire. Durant ces années de plomb, la CIA parvient à sceller une alliance entre les Frères musulmans et le groupuscule ex-communiste de Riyad Al-Turk. Celui-ci et ses amis, Georges Sabra et Michel Kilo, avaient rompu avec Moscou durant la guerre civile libanaise pour soutenir le camp occidental. Ils s’affilient au groupe trotskiste états-unien, Social Democrats USA. Les trois hommes rédigent un manifeste dans lequel ils affirment que les Frères musulmans forment le nouveau prolétariat et que la Syrie ne pourra être sauvée que par une intervention militaire états-unienne. En définitive, les Frères tentent un coup d’État en 1982, avec le soutien du Baas irakien (qui collaborait alors avec Washington contre l’Iran) et de l’Arabie saoudite. Les combats qui suivent à Hama font 2 000 morts selon le Pentagone, 40 000 selon la Confrérie et la CIA. Par la suite, des centaines de prisonniers sont assassinés à Palmyre par le frère du président Hafez el-Assad, Rifaat, qui sera révoqué et contraint à l’exil à Paris lorsqu’il tentera à son tour un coup d’État contre son propre frère. Les trotskistes sont emprisonnés et la plupart des Frères fuient soit vers l’Allemagne (où réside déjà l’ancien Guide syrien Issam Al-Attar), soit vers la France (comme Abou Moussab «  Le Syrien  »), où le chancelier Helmut Kohl et le président François Mitterrand leur donnent asile. Deux ans plus tard, un scandale éclate au sein de l’opposition désormais en exil au moment du partage  : trois millions de dollars ont disparu sur une enveloppe de 10 millions donnée par la Ligue islamique mondiale.

4— Vers la constitution d’une internationale du Jihad

Durant les années 1980, la Ligue islamique mondiale reçoit instruction de Washington de transformer la société algérienne. Durant une décennie, Riyad offre la construction de mosquées dans les villages. Chaque fois, un dispensaire et une école y sont adjoints. Les autorités algériennes se réjouissent d’autant plus de cette aide qu’elles ne parviennent plus à garantir l’accès de tous à la Santé et à l’Éducation. Progressivement, les classes laborieuses algériennes se détachent d’un État qui ne leur est plus d’un grand secours et se rapprochent des mosquées si généreuses.

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Le président Bush père, ancien directeur de la CIA, se prend d’amitié pour l’ambassadeur saoudien, le prince Bandar ben Sultan ben Abdelaziz Al Saoud, qui deviendra plus tard son homologue, chef des services de Renseignement de son pays. Il le considère comme son fils adoptif, d’où son surnom de Bandar Bush.

Lorsque le prince Fahd devient roi d’Arabie saoudite, en 1982, il place le prince Bandar (fils du ministre de la Défense) comme ambassadeur à Washington, poste qu’il conservera durant tout son règne. Sa fonction est double  : d’un côté, il gère les relations saoudo-états-uniennes, de l’autre il sert d’interface entre le directeur du Renseignement Turki et la CIA. Il se lie d’amitié avec le vice-président et ancien directeur de la CIA, George H.W. Bush, qui le considère comme son «  fils adoptif  »  ; puis avec le secrétaire à la Défense Dick Cheney, et le futur directeur de la CIA, George Tenet. Il s’insère dans la vie sociale des élites et intègre aussi bien la secte chrétienne des chefs d’état-major du Pentagone, The Family, que l’ultra conservateur Bohemian Club de San Francisco.

Bandar commande les jihadistes depuis la Ligue islamique mondiale. Il négocie avec Londres l’achat d’armement pour son Royaume auprès de British Aerospace en échange de pétrole. Les contrats du «  pigeon  », (en arabe Al-Yamamah), coûteront entre 40 et 83 milliards de livres sterling à Riyad dont une partie importante sera reversée par les Britanniques au prince.

En 1983, le Président Ronald Reagan confie à Carl Gershman, l’ancien leader de Social Democrats USA, la direction de la toute nouvelle National Endowment for Democracy [5]. C’est une agence dépendante de l’accord des «  Cinq Yeux  », camouflée en ONG. Elle est la vitrine légale des services secrets australiens, britanniques, canadiens, états-uniens et néo-zélandais. Gershman a déjà travaillé avec ses camarades trotskistes et ses amis Frères musulmans au Liban, en Syrie et en Afghanistan. Il met en place un vaste réseau d’associations et de fondations que la CIA et le MI6 utilisent pour soutenir la Confrérie là où c’est possible. Il se réclame de la «  doctrine Kirkpatrick  »  : toutes les alliances sont justes lorsqu’elles servent l’intérêt des États-Unis.

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Dans ce contexte, la CIA et le MI6 qui avaient créé au plus fort de la Guerre froide la Ligue anti-communiste mondiale (WACL), vont l’utiliser pour acheminer en Afghanistan les fonds nécessaires au jihad. Oussama Ben Laden adhère à cette organisation qui compte plusieurs chefs d’États [6].

En 1985, le Royaume-Uni, fidèle à sa tradition d’expertise académique, se dote d’un institut chargé d’étudier les sociétés musulmanes et la manière dont les Frères peuvent les influencer, l’Oxford Centre for Islamic Studies.

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Hassan el-Tourabi et Omar el-Bechir imposent les Frères musulmans au Soudan. Dans le contexte particulièrement sectaire et arriéré de leur pays, ils vont entrer en dissidence avec la Confrérie avant de se détruire mutuellement.

En 1989, les Frères réussissent un second coup d’État, cette fois au Soudan au profit du colonel Omar el-Béchir. Il ne tarde pas à placer le Guide local, Hassan el-Turabi, à la présidence de l’Assemblée nationale. Ce dernier, dans une conférence délivrée à Londres, annonce que son pays va devenir la base arrière des groupes islamistes dans le monde.

Toujours en 1989, le Front islamique du Salut (FIS) surgit en Algérie, autour d’Abassi Madani, tandis que le parti au pouvoir s’effondre dans divers scandales. Le FIS est soutenu par les mosquées «  offertes  » par les Saoudiens, et par voie de conséquence par les Algériens qui les fréquentent depuis une décennie. À la faveur d’un rejet des dirigeants et non par adhésion à son idéologie, il gagne les élections locales. Considérant l’échec des politiques et l’impossibilité ontologique de négocier avec les islamistes, l’armée opère un coup d’État et annule les élections. Le pays s’enfonce dans une longue et meurtrière guerre civile dont on ne saura pas grand chose. La guérilla fera plus de 150 000 victimes. Les islamistes n’hésitent pas à pratiquer à la fois les punitions individuelles et collectives, par exemple lorsqu’ils massacrent les habitants de Ben Talha — coupables d’avoir voté malgré la fatwa l’interdisant — et rasent le village. À l’évidence, l’Algérie sert de laboratoire pour de nouvelles opérations. La rumeur se répand que c’est l’armée, et non pas les islamistes, qui massacre les villageois. En réalité, seuls quelques hauts responsables des services secrets formés aux États-Unis rejoignent les islamistes et sèment la confusion.

En 1991, Oussama Ben Laden, qui est retourné en Arabie saoudite comme un héros de la lutte anticommuniste à la fin de la guerre d’Afghanistan, se brouille officiellement avec le roi alors que les «  sourouristes  » se soulèvent contre la monarchie. Cette insurrection, le «  Réveil islamique  », dure quatre ans et se clôt avec l’emprisonnement des principaux leaders. Elle montre à la monarchie — qui s’imaginait disposer de toute autorité — qu’en entretenant le mélange entre religion et politique, les Frères ont créé les conditions d’une révolte via les mosquées.

Dans ce contexte, Oussama Ben Laden prétend avoir proposé l’aide de quelques milliers d’anciens combattants d’Afghanistan contre l’Irak de Saddam Hussein, mais, ô surprise, le roi aurait préféré le million de soldats des États-Unis et de leurs alliés. Il part «  donc  » en exil au Soudan, en réalité avec la mission de reprendre le contrôle des islamistes qui ont échappé à l’autorité des Frères et se sont soulevés contre la monarchie. Avec Hassan el-Tourabi, il organise des conférences populaires panarabes et panislamiques où il invite les représentants de mouvements islamistes et nationalistes d’une cinquantaine de pays. Il s’agit de créer au niveau des partis l’équivalent de ce que l’Arabie saoudite a déjà fait avec l’Organisation de la Conférence islamique qui réunit, elle, des États. Les participants ignorent que les rencontres sont payées par les Saoudiens et que les hôtels où elles se tiennent sont surveillés par la CIA. De Yasser Arafat au Hezbollah libanais, tous y participent.

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Le FBI parvient à faire condamner la BCCI, une gigantesque banque musulmane devenue au cours du temps celle utilisée par la CIA pour ses opérations secrètes, notamment le financement de la guerre en Afghanistan — mais aussi le narcotrafic en Amérique latine [7]. Lorsque la faillite de la banque est prononcée, ses petits clients ne sont pas remboursés, mais Oussama Ben Laden parvient à récupérer 1,4 milliard de dollars pour poursuivre l’engagement des Frères musulmans au service de Washington. La CIA déplace alors ses activités sur la Faysal Islamic Bank et sa filiale Al-Baraka.

(A suivre…)

Une attaque à la voiture piégée a secoué tôt lundi matin un quartier du centre de Kaboul, faisant "des dizaines de blessés" selon un premier bilan communiqué par les autorités.
  08H50 (04H20 GMT), une explosion s'est produite près du (quartier) PD 16 à Kaboul. Une voiture piégée a d'abord explosé, puis plusieurs assaillants ont attaqué un bâtiment. La zone est bouclée par les forces spéciales de police", a indiqué un porte-parole du ministère de l'Intérieur, Nasrat Rahimi.

"Des dizaines de blessés ont été transférés dans les hôpitaux", a écrit un porte-parole du ministère de la Santé, Wahidullah Mayar, sur Twitter.

Une colonne de fumée s'élevait dans le ciel et un journaliste de l'AFP pouvait entendre des tirs dans la zone. L'explosion, qui s'est produite à une heure de pointe dans le quartier de Puli Mahmood Khan, n'a pas été revendiquée dans l'immédiat.
 

A peine quelques heures après l'avertissement lancé par la Turquie à la Russie selon lequel le retour des réfugiés syriens ne serait permis à moins qu'une zone tampon soit crée dans le nord est de la Syrie avec comme chef lieu la ville de Manbij, une nouvelle attaque au drone a visé la base russe à Hmeimim. Cette attaque vient d'avoir lieu alors que de très violents raids russes ont précédé de quelques heures cette frappe, visant surtout les monts de Kanani à Lattaquié d'où les terroristes qaïdistes du Parti du Turkestan (PIT) se battent sous la bannière de la Turquie, de l'OTAN mais aussi d'Israël.

Selon Al-Masdar qui rapporte l'information, les terroristes implantés dans l'ouest d'Idlib ont tenté de bombarder mercredi 26 juin la base aérienne russe au sud-ouest de Lattaquié avant que « l’armée russe ne repousse cette attaque ». Le général de brigade Alexeï Bakine, chef du Centre russe pour la réconciliation des parties en conflit en Syrie qui rapporte cette information, affirme que deux drones ont été interceptés et abattus par les systèmes de la DCA russes alors qu’ils s'approchaient de la base russe. 

L’Autorité des aéroports d’Israël (IAA) a annoncé mardi à la fédération internationale des associations de pilotes d’avions aériens (IFALPA) que "de nombreux" pilotes avaient perdu les signaux satellites du système de positionnement global (GPS) autour de l’aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv. Ce dysfonctionnement intervient dans un contexte d'extrême tension USA/Iran, à peine 24 heures après la fin de la réunion "sécuritaire" Russie/USA/Israël à Qods.

Le yo-yo américain entre l'Iran et le Venezuela se poursuit : alors que le régime américain poursuite la voie de l'escalade militaire face à l'Iran, des informations font état d'une nouvelle tentative de coup d'Etat US au Venezuela. Il y a deux jours, les sources vénézuéliennes ont évoqué l'arrestation de plusieurs militaires dont un officier de l'Armée de l'air. Selon le ministre vénézuélien de la Communication et de l’Information, Jorge Rodriguez, des"enregistrements vidéo découverts prouvent que des armes et de l’argent ont été transférés dans le but d’organiser un coup d’État". Lors d’une conférence de presse retransmise par la chaîne d’information Telesur TV, le 26 juin, il a aussi affirmé que les conspirateurs prévoyaient de saisir des dépôts de munitions et un aéroport militaire à Caracas, puis de libérer l’ancien ministre de la Défense, Raul Baduel, condamné à une longue prison pour corruption en 2009.

"Les putschistes envisageaient de proclamer Baduel président de la République après avoir assassiné le président légal du Venezuela, Nicolas Maduro, à l’aide des mercenaires étrangers". Le 30 avril dernier, le pantin des États-Unis, Juan Guaido qui s'est autoproclamé président de la République, a tenté un énième coup de force à l'aide d'une poignée de militaires. Des affrontements ont éclaté près de la base militaire de la Carlota mais faute de soutien de l'armée vénézuélienne fidèle au chef de l'État, il a lamentablement échoué.